Le rapport « l’avenir de l’alimentation et de l’agriculture » adopté par le Conseil économique et social européen le 23 mai 2018 plaide en faveur d'un financement substantiel de la Pac.
« Les agriculteurs européens – les exploitations familiales, les PME, les coopératives et les autres systèmes d’agriculture traditionnels – doivent pouvoir vivre des revenus de leurs exploitations. Cette exigence doit être garantie par des prix équitables et des paiements directs substantiels, ces derniers devant être exclusivement destinés aux agriculteurs actifs et aux entreprises agricoles dont les modes de production répondent à des critères objectifs et respectent les pratiques régionales, et qui fournissent des biens publics. Il ne suffit pas d’être propriétaire de terres agricoles », explique Jarmila Dubravská, rapporteure de l’avis.
Afin de maintenir une agriculture durable et viable dans l’Union Européenne, la Pac doit, selon le Cese, renforcer la situation financière des agriculteurs et leur position dans la chaîne d’approvisionnement. Elle vise aussi à attirer et soutenir les jeunes agriculteurs dans une logique de renouvellement des générations. Ainsi, la Pac doit garantir le fonctionnement du marché unique, mais aussi répondre à des problématiques environnementales (changement climatique, biodiversité…) et sociales (emploi dans les zones rurales), en tenant compte des principaux objectifs de développement durable des Nations unies et de l’accord de Paris. « Cela implique notamment de disposer d’un solide premier pilier garantissant un revenu équitable aux agriculteurs actifs et les incitant à fournir des biens publics, ainsi que d’un second pilier correspondant à la déclaration de Cork 2.0 et venant davantage à l’appui des régions rurales en Europe. »
Outre un financement conséquent, le Cese défend une simplification de sa mise en œuvre et met en garde contre sa renationalisation. « Le Cese est favorable à une Pac solide et bien financée ainsi qu’à une augmentation du budget européen à 1,3 % du RNB (revenu national brut), en cohérence avec la croissance de l’économie européenne. Il convient de doter la Pac d’un financement adéquat pour faire face à la faiblesse des revenus des agriculteurs et des travailleurs agricoles, à l’inflation et à tout déficit découlant du Brexit, ainsi qu’aux exigences supplémentaires posées en matière d’environnement et de changement climatique », fait savoir John Bryan, corapporteur de l’avis.
Refondre le système de contrôle
« Pour les agriculteurs européens, il est d’une importance cruciale que les propositions législatives comportent une simplification réelle des composantes les plus bureaucratiques de la Pac », poursuit-il, évoquant notamment la question des contrôles sur place. Le Cese suggère une refonte du système de contrôle sur l’exploitation, afin d’en améliorer l’efficacité et de le rendre moins bureaucratique grâce à de nouvelles technologies plus performantes. Dans son avis, le Comité propose ainsi une liste de points très précis à mettre en œuvre. « Nous sommes favorables à un système de contrôle global fondé sur les risques, mais celui-ci doit gagner en efficacité et privilégier l’orientation et les incitations plutôt que les sanctions », souligne John Bryan.
La subsidiarité devrait s’appliquer uniquement aux plans des États membres pour la mise en œuvre des objectifs de la Pac. Ils bénéficieraient ainsi d’une certaine souplesse quant aux modalités de paiement en fonction de leurs structures, conditions et modèles respectifs en matière d’agriculture mais aussi de leur environnement. Toutefois, le Cese se montre défavorable au transfert des fonds du second pilier vers le premier par les Etats membres, mais souhaite un niveau raisonnable de cofinancement du second pour tous les États membres. « Le bon fonctionnement du marché unique ne doit pas être mis en péril. Une renationalisation entraînerait une divergence accrue des prix et des marchés », souligne Mme Dubravská.
Afin d’éviter les pratiques trompeuses et de permettre aux consommateurs un choix éclairé, le Cese préconise l’étiquetage obligatoire de l’origine des produits. John Bryan renvoie par ailleurs à la question des accords commerciaux internationaux consentant l’importation dans l’UE de denrées alimentaires qui ne répondent pas à ses normes. « L’Union européenne doit poursuivre une stratégie plus cohérente au regard de la Pac et de sa politique commerciale », insiste-t-il.
Dans une optique de renouvellement générationnel, le Cese propose aussi d’améliorer le soutien aux jeunes agriculteurs au travers de plusieurs propositions comme l’augmentation du paiement complémentaire de 25 % fourni aux jeunes agriculteurs au titre du premier pilier et la création d’un régime de retraite dans le second pilier incluant un programme de mobilité des terres. Il prévoit aussi l’apport d’un complément de revenu, sous forme de paiement mensuel pendant cinq ans, aux jeunes qui créent de petites structures produisant pour les marchés locaux. Le Cese espère aussi la prise de dispositions relatives à l’innovation et au transfert de connaissances, etc. Enfin, le Cese demande de prévoir des mesures pour encourager les femmes en agriculture.