Portrait
« Pas de journée type » pour Muriel Penon, agricultrice et élue

Aujourd'hui, « 9,7 % des administrateurs de coopératives sont des femmes alors qu'elles représentent 1/4 des chefs d'exploitation. Les choses évoluent mais ça n'avance pas assez vite », selon Muriel Penon. (©Muriel Penon/Twitter)
Aujourd'hui, « 9,7 % des administrateurs de coopératives sont des femmes alors qu'elles représentent 1/4 des chefs d'exploitation. Les choses évoluent mais ça n'avance pas assez vite », selon Muriel Penon. (©Muriel Penon/Twitter)

« Originaire de Cognac, je suis une Charentaise pure souche, se présente Muriel Penon. Mes parents étaient viticulteurs et je les ai souvent suivis dans les vignes ». Après un BTA services, option tourisme en milieu rural, Muriel suit une école de communication européenne pendant un an, puis un BTS Acse. « J'ai alors commencé à tâter le terrain auprès de mes parents pour m'installer : je souhaitais diversifier l'exploitation avec un projet d'agritourisme », explique-t-elle, reliant ainsi ses passions pour l'agriculture et le tourisme. « Mais en 1992, arrive la Pac et mon père a eu peur "qu'on se plante" ».

Muriel Penon devient alors formatrice pendant 2-3 ans dans un institut rural d'éducation et d'orientation. Et pour se rapprocher de son mari Vincent, elle travaille ensuite pendant 7 ans dans une association de gestion et de comptabilité (AFOCG) en Charente-Maritime. L'association s'arrête en même temps que l'arrivée de leur 2e enfant, Muriel décide de prendre un congé parental de 3 ans pour s'occuper de ses enfants. C'est à ce moment-là, qu'elle réfléchit à s'associer en tant qu'agricultrice avec son mari qui travaillait avec ses parents. « La fin de ce congé coïncidait avec leur départ à la retraite », précise-t-elle. 

Validation des acquis par l'expérience (VAE), puis parcours à l'installation, la jeune agricultrice reprend le capital de ses beaux-parents pour une installation à parts égales avec Vincent le 1er janvier 2008. « Sur l'exploitation, nous produisons des céréales, des semences (maïs, tournesol et blé) (SAU : 186 ha). En 2008, nous avons également vendu le troupeau de vaches laitières, pour se lancer dans l'élevage de vaches allaitantes, avec un troupeau de Limousines pour valoriser les 59 ha de prairies naturelles ».

« Expliquer notre métier »

« Un voisin agriculteur a lancé un magasin de producteurs et nous a proposé de l'accompagner dans ce projet. Début 2011, on était 5, à la fin de l'année on était 20. Toutes nos bêtes étaient alors vendues au magasin, j'y passais 2 à 3 jours par semaine. » C'est une révélation pour Muriel : « j'apprécie le contact avec les consommateurs,  leur expliquer notre métier, comment on produit sur notre exploitation. J'ai vraiment ressenti au magasin leurs attentes à ce niveau-là. » Mais finalement les prix fixés au départ n'étaient pas suffisants et l'organisation compliquée à 20. « On a pris la difficile décision de quitter le magasin en juin 2017 : ça a été un véritable crève-cœur pour moi ». 

Par la suite, le couple démarre un atelier de vente directe sur la ferme : « On a mis en place une jolie boutique, un site Internet... D'une vache tous les 2 mois, on est passé à environ une vache/mois. Aujourd'hui, je me régale ! Il n'y a pas de journée type. Les clients sont curieux et posent des questions. J'ai vraiment besoin de ce contact. Si je peux, je prends le temps de leur faire visiter l'exploitation, etc. », ajoute l'agricultrice aujourd'hui épanouie dans son métier. Dans le même objectif, elle partage aussi activement son quotidien via les réseaux sociaux, elle a notamment vite adhéré aux FranceAgriTwittos (FrAgTw) : « je me suis complètement retrouvée dans cette association. On explique notre travail, il y a beaucoup d'échanges et c'est toujours bienveillant. On a l'impression d'avoir créé une nouvelle famille, les retrouvailles au Salon de l'agriculture étaient vraiment appréciables ».

Engagée pour la place des femmes dans la coopération

Autre cheval de bataille pour Muriel Penon : la place des femmes en agriculture et notamment dans la coopération agricole. « Ma mère travaillait autant que mon père sur l'exploitation, mais elle n'a jamais eu de statut. Après des rendez-vous comptables, elle disait souvent "moi, je ne suis rien", se souvient l'agricultrice. Ça marque ! »

Aujourd'hui, « 9,7 % des administrateurs de coopératives sont des femmes alors qu'elles représentent 1/4 des chefs d'exploitation. Les choses évoluent mais ça n'avance pas assez vite », selon Muriel, qui a été la 1ère femme élue dans le conseil d'administration (CA) de sa coopérative Terre Atlantique. « Ça n'a pas été forcément facile au début, mais j'ai vite trouvé ma place. Désormais nous sommes 3 femmes pour un CA composé de 20 administrateurs et je fais partie des membres du bureau ».

Avec plusieurs collègues agricultrices, elles ont lancé un collectif indépendant "Les Elles de la Coop", soutenu par la Coopération agricole, pour inciter les coopératives à plus de mixité dans les CA. « On avance bien, surtout dans l'Ouest pour le moment », note Muriel, qui espère sensibiliser tout le territoire français. Le groupe propose des formations pour les agricultrices et amplifie ses actions de communication avec la création à venir de pages sur les réseaux sociaux et d'autres supports, l'élaboration d'un kit de la mixité pour les coopératives, etc. Un évènement est également prévu à ce sujet pour la Semaine de la coopération, du 4 au 12 juin prochains. 

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