Témoignages d'agris et avis d'experts
Ce qu'il faut savoir sur la culture du tournesol

Vous êtes producteur de tournesol ? Venez partager votre expérience dans les commentaires en dessous de l'article. (©Terre-net Média)
Vous êtes producteur de tournesol ? Venez partager votre expérience dans les commentaires en dessous de l'article. (©Terre-net Média)

Atouts/contraintes

Quels sont les atouts et les contraintes du tournesol ?  Retrouvez les points les plus cités par les agriculteurs dans le tableau ci-dessous :   

-
Stabilité de rendement
Economie en temps et en intrants Sensibilité aux dégâts de ravageurs à la levée
Tolérance à la sécheresseAttention à la maturité de récolte selon les secteurs 
Gestion de l'enherbement dans la rotation (flore hivernale)

Retours d'expériences 

Deux producteurs nous livrent plus de détails sur le sujet. Du côté de Saint-Ermine en Vendée, Maxime Gautreau cultive du tournesol depuis son installation (en 2018) : entre 5 et 20 ha selon les années. Son assolement sur 150 ha se découpe ainsi : 1/3 de maïs semences, 1/3 de blé (tendre et dur) et 1/3 partagé entre le colza, le tournesol et l'orge (d'hiver et de printemps). Bien que l'exploitation soit située dans le nord de la zone de production qu'est le Sud-Ouest, la culture du tournesol est « incontournable ». L'agriculteur l'apprécie notamment pour son côté rustique : « elle tolère bien les contraintes hydriques estivales ».

« En 2022, les maïs non-irrigués ont vu leur rendement divisé par 3 dans le secteur avec la sécheresse. Et on a souvent des soucis de levée pour les colzas. » Maxime Gautreau privilégie ainsi le tournesol dans ses parcelles non-irrigables. « Il assure une stabilité de rendement » : un atout qui peut aussi être vu comme « un point faible » selon le producteur. « Car on n'a jamais de record avec cette culture. Le rendement moyen est compris entre 27 et 33 q/ha selon les années », précise-t-il.

« Les dégâts d'oiseaux représentent l'un des principaux freins pour la culture, dans notre secteur et pas seulement, observe Maxime Gautreau. Les effaroucheurs visuels et/ou sonores peuvent diminuer la nuisance, mais il n'y a pas de solution miracle ! Nous avons fait aussi des essais de semences traitées Korit sur 2 allers-retours avec le Ceta et nous n'avons observé aucune différence. » Pour l'agriculteur, une présence humaine régulière sur la parcelle est indispensable entre la germination et le stade 2 feuilles. Pendant cette période, il essaye de passer 4 fois/jour. 

Les problèmes causés par les pigeons et les corbeaux sont également soulevés par Tanguy Fourdinier, installé dans la Somme. L'agriculteur s'est lancé dans la culture de tournesol la campagne dernière, avec un premier essai sur 3 ha. Le but : « tester les possibles grandes cultures de demain dans nos régions avec le réchauffement climatique, compte-tenu de la bonne tolérance à la sécheresse du tournesol », explique-t-il. C'est aussi une opportunité pour « diversifier notre assolement ». Malgré les soucis rencontrés avec les oiseaux, l'essai s'est montré plutôt convaincant avec un rendement moyen de 32 q/ha et des prix très intéressants en 2022. « La culture s'adapte bien dans notre secteur », ajoute Tanguy Fourdinier, qui compte en semer 6 ha cette année. 

Si les cours actuels ont fortement baissé, la culture du tournesol conserve un intérêt pour les deux agriculteurs, du fait de « son faible besoin en intrants » et donc des « charges opérationnelles limitées (entre 300 et 450 €/ha selon Terres Inovia) ». Entre le semis et la récolte, Maxime Gautreau compte, par exemple, « un désherbage chimique, complété par un binage et un apport de 40 à 50 u d'azote ». Tanguy Fourdinier résume également son itinéraire technique de l'an passé sur le territoire samarien : « semis au 15 avril, un désherbage chimique qui a très bien fonctionné, un passage d'engrais de fond et un apport d'azote (60 u), en plus de l'amendement organique après la récolte du blé ». L'agriculteur a également eu recours à un insecticide au stade 4 feuilles contre les pucerons. 

« Nous avons peu de soucis au niveau des maladies », souligne aussi Maxime Gautreau.  Le seul point d'attention dans son secteur concerne le verticilium, d'autant qu'il n'existe aucune solution fongicide pour lutter contre. Le producteur agit alors en préventif avec l'allongement de la rotation (retour tous les 6 ans) et un choix variétal adapté. En effet, la tolérance au verticilium constitue l'un des trois principaux critères de décision de Maxime Gautreau, avec le caractère oléique ou linolénique de la variété et la tolérance aux herbicides, selon les soucis d'adventices rencontrés dans les parcelles.

Pour Tanguy Fourdinier, « le choix de la variété, ainsi que la date de semis et la fertilisation, doivent également être adaptés pour éviter une récolte au-delà de septembre » dans son secteur. Objectifs : « assurer de bonnes conditions de récolte et une bonne organisation des chantiers, éviter par exemple que cela coïncide avec les arrachages de pommes de terre ». « Le  tournesol est une cuture agréable dans les parcelles, note aussi l'agriculteur : il constitue un bon relai de fleurs pour les abeilles, après les colzas ».

Points d'attention sur l'itinéraire technique

Comme l'ont souligné les agriculteurs juste avant, le tournesol nécessite peu d'interventions. Certains points techniques sont toutefois à soigner pour valoriser au mieux le potentiel de la culture

L'implantation, une étape clé 

Parmi eux, l'implantation reste une étape primordiale pour « obtenir un tournesol robuste et ainsi limiter les stress biotiques et abiotiques tout au long du cycle. Celle-ci va être conditionnée, dans un premier temps, par un travail du sol visant à améliorer la qualité d'enracinement et de levée, puis dans un second temps, par un respect des règles de semis pour optimiser une levée rapide », rappellent les experts de Terres Inovia. 

L'institut technique met en avant 6 règles d'or pour réussir son semis de tournesol : 

  • « Attendre le réchauffement du sol avant de semer ». Le seuil est fixé à 8°C, à 5 cm de profondeur, en début de matinée et plusieurs matinées de suite pour maximiser les chances de réussite. 
  • « Semer à la bonne date ». La période idéale s'étale entre la première quinzaine d'avril et le 20 mai selon les secteurs pour avoir un sol suffisamment réchauffé et pour éviter les récoltes trop tardives.
  • « Assurer une profondeur régulière du semis : 2 à 4 cm, selon l'humidité du sol ».
  • « Viser un seuil de 50 000 plantes/ha levées  »
  • « Adapter sa vitesse de semis ». « Idéalement 4 km/h, voire 6 km/h maximum. L'avantage est au semoir monograine, attention à ne pas négliger les réglages. »
  • « Préférer un écartement 50 cm par rapport à 75 cm ». « Les écartements larges peuvent augmenter la compétition entre plantes sur le même rang et limiter la capacité d’interception de la lumière par le couvert. »

Le choix variétal constitue également un point d'attention majeur. L'offre actuelle permettant de prendre en compte le contexte sanitaire et pédoclimatique de chaque situation (précocité, gestion des flores difficiles, maladies, etc.). 

Quels sont les ravageurs du tournesol ? 

Dès la levée, la culture est soumise à l'attaque de plusieurs ravageurs, dont les taupins et les limaces. Dans les deux cas, le premier levier reste de viser une levée rapide. Face aux limaces, Terres Inovia recommande également « d'éviter les sols creux, motteux, avec des résidus de récolte en surface » et d'observer leur présence avant le semis, afin d'anticiper une application d'anti-limaces en fonction. 

Avec les oiseaux, là encore, « les dégâts seront d'autant plus faibles que la levée est rapide et homogène ». « Les effaroucheurs sonores ou visuels peuvent constituer des méthodes de dissuasion présentant une certaine efficacité s’ils sont mis en œuvre de façon préventive. Attention, un effaroucheur ne protège qu’une surface limitée et les oiseaux s’accoutument rapidement. » Pour éviter ce phénomène, l'institut technique recommande alors de « le positionner juste avant la phase sensible (levée pour les pigeons, semis pour les corvidés) et de le déplacer régulièrement. En fin de cycle, les pertes et dégâts sont plus faibles : récolter tôt, dès que la maturité est atteinte, est la seule parade pour limiter les prélèvements de graines par les oiseaux, mais aussi la casse par les grands animaux (sangliers, cerfs) ».

Autres ravageurs cités par l'institut technique : 

- Les noctuelles terricoles (ou vers gris) « à surveiller dès la levée de la culture. Les larves sont actives la nuit et enfouies au pied des plantes le jour. On peut repérer leur présence en grattant le sol ». 

- Les pucerons, principalement le puceron vert du prunier (Brachycaudus helichrysi). « Leurs piqûres provoquent des crispations du feuillage. L'observation des pucerons étant délicate, c'est souvent le seuil de risque de 10 % de plantes avec ces symptômes qui est utilisé à la place du dénombrement des pucerons ».  La vigilance s'étend de la levée à la formation du bouton floral. À noter que les insectes auxiliaires peuvent « contenir efficacement le développement des populations de pucerons », malgré leur arrivée en décalé. Parmi les plus efficaces : « les coccinelles, les chrysopes, les syrphes et les parasitoïdes ».

L'institut technique conseille de « ne pas intervenir trop rapidement au risque de détruire ces auxiliaires qui auraient pu éviter un traitement et suivre l’évolution des populations tout en considérant le développement de la culture : une culture avec une croissance dynamique sera moins impactée. Les pertes de rendement peuvent atteindre 2 à 3 q/ha en moyenne en cas d’attaque significative avant la formation du bouton floral, mais deviennent faibles au-delà ».

- Les chenilles de noctuelles défoliatrices : « leur nuisibilité est généralement faible sur tournesol, sauf ponctuellement en cas de pullulation ».

Désherbage : des moyens de lutte à adapter selon la flore présente

Selon Terres Inovia, le tournesol est « un atout dans les rotations à base de cultures d'hiver car il offre davantage de fenêtres de faux-semis et davantage de modes d'action alternatifs contre graminées ». Moyens de lutte agronomique et chimique (prélévée, post-levée) sont à adapter en fonction de la flore présente dans les parcelles et du niveau de pression. 

La culture se prête bien aussi au désherbage mécanique. Le binage peut, en effet, être une solution complémentaire ou alternative aux herbicides. Attention, bien sûr, à « intervenir par temps séchant, sur un sol sec, en l'absence de pluie annoncée dans les jours qui suivent, et sur des adventices ne dépassant pas le stade 3-4 feuilles ».

Une culture peu exigeante, attention toutefois aux carences

« Le tournesol est moyennement exigeant en potasse et peu exigeant en phosphore. Le sol est en général en mesure de couvrir les besoins de la plante. Cependant, des carences peuvent survenir et causer des symptômes visibles avec des conséquences variables sur la productivité. » Pour prendre la bonne décision, l'institut technique préconise le recours aux analyses de sol. 

La dose d'azote à apporter est également à raisonner en fonction des reliquats et de l'objectif de rendement. L'azote doit « être apporté de préférence en cours de végétation, entre les stades 6 et 14 feuilles. Dans le Sud, ces apports en végétation sont par contre à éviter pour les semis réalisés après fin avril en raison du risque de sécheresse pouvant limiter l'absorption de l'élément ».

Un apport préventif de bore est recommandé dans les situations à risque : « parcelles où des carences en bore ont déjà été observées au cours des dernières années ; sols superficiels ou peu profonds (argilo-calcaires, limons peu profonds, boulbènes, sols filtrants, sols sableux, etc.) ; situations à risque de mauvais enracinement suite à un travail du sol effectué dans de mauvaises conditions ; parcelles en rotation courte : 1 tournesol tous les 2 ou 3 ans). La période conseillée pour réaliser l'apport : « entre le stade 10 feuilles et le stade limite du passage du tracteur ».

Les maladies du tournesol

Parmi les maladies du tournesol, le mildiou provoque des symptômes d'autant plus grave que l'attaque est précoce. Pour s'en prémunir, plusieurs mesures agronomiques sont à mettre en place, comme : 

- « Viser un retour du tournesol dans la rotation au maximum une année sur trois » ;
- « Semer dans un sol bien ressuyé et réchauffé, et retarder autant que faire se peut le semis si de fortes pluies sont annoncées les jours suivants » ;
- « Détruire par un désherbage adapté toutes les espèces pouvant héberger le mildiou (repousses de tournesol, ambroisie à feuilles d’armoise, bidens, xanthium) » ;
- « Eviter aussi les plantes hôtes du mildiou en interculture (niger, sylphie, repousses de tournesol...) ».

Enfin, l'alternance dans le choix variétal et le traitement de semences sont les deux autres piliers de la protection. 

- « La rouille blanche se caractérise par des taches boursoufflées vert jaune sur les feuilles, disposées plutôt dans la partie apicale du limbe et des croûtes blanc crème sont visibles sur la face inférieure de ces boursoufflures. La nuisibilité est en général faible et aucun moyen de lutte n’est aujourd’hui disponible face à cette maladie ».

- Il n'existe également aucun produit fongicide, à ce jour, contre le verticilium. La lutte repose sur l'allongement de la rotation et le choix variétal. 

- « Les attaques de sclérotinia les plus nuisibles sont souvent observées sur les récoltes tardives. » Une solution fongicide est disponible, Terres Inovia recommande néanmoins de privilégier les variétés peu sensibles et de viser une récolte début septembre, en adaptant la date de semis et la précocité variétale à la région ».

- Concernant le botrytis, « les spores du champignon germent sur les fleurons durant la floraison. Le mycélium provoque une pourriture beige se recouvrant de spores grises (à ne pas confondre avec le sclérotinia) qui, suivant sa précocité, peut envahir l’ensemble du capitule, face fleurie comprise. Récolter tôt est le moyen le plus efficace pour éviter les attaques nuisibles. Il n'y a pas de résistance variétale ».

- Des attaques de phomopsis sont régulièrement observées dans le Sud-Ouest. «  Privilégier alors des variétés résistantes ou très peu sensibles. Il faut également veiller, en particulier dans les parcelles à sol profond, à maîtriser au mieux la croissance du tournesol en évitant les semis trop précoces et les densités de peuplement trop élevées. [...] La décision de traiter doit tenir compte du risque phomopsis dans la région, de la variété choisie, de la situation de la parcelle et des bulletins de santé du végétal (BSV).» Enfin, pour limiter les contaminations les années suivantes, le broyage et l'enfouissement des cannes sont recommandés. 

-  « La lutte fongicide contre le phoma peut se justifier dans les situations où de fortes attaques ont été observées au cours des années précédentes et dans les parcelles dont le potentiel est supérieur à 20-25 q/ha. Dans la mesure où les solutions fongicides actuelles ciblent à la fois le phomopsis et le phoma, le raisonnement de l’application fongicide contre le phoma doit d'abord tenir compte du risque phomopsis, qui est le plus nuisible. L’apport de bore peut se faire conjointement au traitement fongicide. Comme dans le cas du phomopsis, l’enfouissement et le broyage des cannes de tournesol sont très efficaces pour limiter la pression du phoma, à condition d’être étendus à l’échelle du secteur de production. Dans les parcelles irrigables où le risque est important, une irrigation de fin de floraison peut contribuer à limiter le dessèchement précoce. » 

Irrigation 

Bien que le tournesol soit mis en avant pour sa bonne tolérance à la sécheresse, l'irrigation peut avoir « un réel intérêt, selon Terres Inovia, avec des quantités d'eau modérées dans les situations où cela est possible, si le tournesol est peu vigoureux et le sol sec. Cela doit se faire impérativement avant la floraison ».

Récolte

C'est un rappel assez évident : le tournesol doit être récolté dès que la majorité de la parcelle a atteint le stade optimal. « C'est-à-dire lorsque le dos du capitule vire du jaune au brun, les feuilles sont toutes sénescentes, la tige se dessèche et passe du vert au beige clair, et la graine contient entre 9 et 11 % d'humidité ». 

Attention aussi à « adapter la coupe et régler le matériel en fonction ». 

Inscription à notre newsletter

Soyez le premier à réagir