« Adaptation du travail du sol pendant l’interculture, semis précoce, pratique du colza associé, fertilisation au semis… C’est la combinaison de ces différents leviers qui est mise en avant pour viser un colza robuste, face aux contraintes climatiques et à la menace des ravageurs d’automne notamment, rappelle Mathieu Dulot, ingénieur de développement chez Terres Inovia. Le choix variétal est également un point important, qui va contribuer à la réussite de la culture ». À l’occasion d’un webinaire, les équipes de l’institut technique nous rappellent les critères à prendre en compte dans cette étape.
L’objectif : « essayer de mettre au mieux les bonnes variétés au bon endroit. Et pour cela, le choix ne doit pas se faire uniquement sur le rendement », note Arnaud Van Boxsom, responsable de l’évaluation des variétés pour Terres Inovia. « Différents critères sont à prendre en compte en fonction du contexte pédoclimatique de l’exploitation et des contraintes locales ». C’est dans cet objectif que l’institut technique propose son outil de choix variétal myvar, disponible en ligne gratuitement. Il permet désormais de chercher les variétés les plus adaptées à sa situation via l’indicateur de « mérite agronomique » (onglet "Choisir").
Vigueur et comportement vis-à-vis des ravageurs d’automne
Terres Inovia fait régulièrement évoluer la caractérisation des variétés de colza en fonction des problématiques rencontrées. « Depuis quelques années, de nouveaux critères essentiels dans la lutte contre les ravageurs d’automne et en particulier les grosses altises ont ainsi été intégrés comme la vigueur du début de cycle et le comportement vis-à-vis des ravageurs d’automne. L’évaluation de la vigueur consiste en une observation via une photographie par drone à plusieurs périodes pour certains essais variétaux. Cela permet de distinguer deux vigueurs » :
- « La vigueur de départ qui caractérise la surface foliaire atteinte au stade 3-4 feuilles pour mieux résister aux morsures de grosses altises » ;
- « La vigueur automnale qui classe les variétés selon leur dynamique de croissance jusqu’à l’entrée de l’hiver pour mieux résister à la pression des larves d’altises. »
« Au stade 3-4 feuilles, on mesure une différence de surface foliaire de 5 à 10 % entre les variétés les moins et les plus vigoureuses. Cet écart s’accentue pendant l’automne avec 15 à 20 % entre les extrêmes au stade 8-10 feuilles à l’entrée de l’hiver. On observe régulièrement une corrélation entre ces 2 vigueurs, mais cela n’est pas toujours le cas pour certaines variétés. D’où l’importance de garder ces deux variables pour le classement », souligne Arnaud Van Boxsom.
En 2023, Terres Inovia a pu analyser 17 essais, notamment réalisés dans le cadre du projet Adaptacol. Retrouvez le tableau résumé des résultats de l’année :

« À titre d’exemple, la nouveauté Bessito présente des vigueurs départ et automnale importantes. À l’opposé, Hanissa confirme son classement de l’année dernière avec une vigueur plus faible. »
Terres Inovia évalue également le comportement des variétés vis-à-vis des attaques de larves d’altises. Pour proposer une classification, les équipes s’appuient sur deux variables : des mesures d’infestation larvaire via la méthode Berlèse et des comptages de plantes buissonnantes avant la floraison. « Là encore, c’est important de conserver ces deux variables. En effet, certaines variétés présentent deux fois plus de larves que d’autres dans un même essai, mais n’expriment cependant pas la même gravité de symptômes avec moins de plantes buissonnantes. »
En 2023, 47 essais ont été analysés pour donner ce tableau résumé des résultats de l’année :

« Feliciano KWS qui est notre variété témoin pour ces essais, reste la référence en termes d’infestation larvaire et de symptôme de plantes saines (sans ports buissonnants). Certaines variétés comme KWS Arianos ou LG Armada présentent une infestation larvaire fréquemment élevée, mais l’expression des symptômes reste faible. Inversement, malgré une tendance à avoir moins de larves/plantes, Attica ou Heliott présentent régulièrement des plantes buissonnantes dans ce type d’essais. »
D’autres critères importants en fonction
« Attention à ne pas oublier les autres critères à prendre en compte. Pour les situations parcellaires particulières notamment, il faut veiller à privilégier des variétés à certains pathotypes de la hernie des crucifères ou à bon comportement face à l’orobanche rameuse par exemple. » « Pour le reste des situations, on va, bien sûr, regarder aussi le rendement. Terres Inovia publie beaucoup de données sur le sujet ». À ce sujet, Arnaud Van Boxsom conseille de ne pas prêter attention au résultat de l’année à la virgule près, mais plutôt de surveiller la régularité pluriannuelle.
Autre point d’attention : la sensibilité à l’élongation automnale. « L’automne 2022, chaud et poussant, a mis en avant ce critère. » Mieux vaut éviter les variétés avec une forte sensibilité dans les situations à risque. À noter toutefois : les variétés dotées d’une bonne vigueur à l’automne ne sont pas forcément sujettes à l’élongation. « On peut trouver des variétés vigoureuses avec une sensibilité moyenne qui ne nécessitent pas de régulateur à l’automne si les facteurs azote et densité sont maîtrisés ». « C’est la même chose pour la verse. Si ces deux facteurs sont maîtrisés, il n’y a pas de risque potentiel. De plus, beaucoup de variétés sont classées « très peu sensibles » et « sensibles ». Et on l’oublie un petit peu mais le phoma reste une problématique encore présente dans certains secteurs, et donc à prendre en compte dans les critères de choix.
D’autres critères sont également en cours d’étude : Terres Inovia mène notamment des travaux sur la tolérance au sclérotinia, l’égrenage et l’efficience azotée. On ne manquera pas de suivre le sujet.