Dans ses dernières estimations, présentées en point presse jeudi 13 avril, FranceAgriMer a revu en baisse les perspectives d’export de blé tendre sur la campagne de commercialisation 2022/23. L’organisme les rabote de 50 000 t vers les pays tiers par rapport aux chiffres du mois de mars, à 10,4 Mt (contre 8,78 Mt en 2021/22 et 7,42 Mt en 2020/21). Ceci s’explique surtout par un ralentissement de la demande du Maroc.
Les exportations vers l’Union européenne seraient aussi moins élevées que prévu sur cette campagne, en lien avec des achats moindres des Pays-Bas : 6,43 Mt, contre 6,5 Mt estimés en mars, 8,01 Mt réalisés sur la campagne 2021/22 et 6,11 Mt sur 2020/21.
En tout, 16,95 Mt de blé tendre français en tout sont donc attendus à l’exportation sur 2022/23, soit 41 000 t de plus qu’en 2021/22 et 3,3 Mt de plus qu’en 2020/21.
Et à neuf mois de campagne, 13,3 Mt ont déjà été exportés, souligne Paul Le Bideau, responsable de l’unité Grains et sucre de FranceAgriMer, qui pointe la forte hausse observée vers le Maroc (x 2,5 par rapport à 2021/22 sur la même période) et l’Algérie (+ 32 %).
Ces prévisions à l’export ne prennent pas en compte l’affaire de la phosphine, ont précisé les experts de FranceAgriMer. Rappelons que 7 avril, le journal L'Opinion révélait qu’à la fin du mois, il serait interdit d’utiliser l’insecticide PH3 (phosphine) par fumigation en contact direct des céréales, un mode de diffusion requis par de nombreux pays acheteurs de blé français à l’international.
Face à l’inquiétude de la profession et des députés, les ministres de l’agriculture et du commerce ont rassuré, indiquant que le gouvernement allait travailler à une solution juridique pour que la France ne soit pas privée d’exports vers les pays tiers après le 25 avril.
Benoît Piétrement, président du conseil spécialisé "grandes cultures" de FranceAgriMer, a profité de ce point presse pour faire part de son « agacement » quant à cet imbroglio réglementaire : « Ce n’est pas à l’Anses de prendre de telles décisions, c’est aux politiques, en lien avec la réglementation européenne ! (…) Là-dessus, on a besoin de vrai courage politique. On met en jeu tout un pan de l’économie agricole ! »
« On ne peut pas se retrouver avec de telles distorsions de concurrence avec l’Europe et le monde (…), on ne peut pas nous demander d’être compétitifs et de faire un 100 m avec des boulets de 100 kg aux pieds, a-t-il ajouté. Les pays concurrents, et je pense à la Russie, doivent bien sourire. »
Et si la réaction des ministres a pour l’heure apaisé les craintes de la profession, Benoît Piétrement conclut : « On est inquiets sur la durée, sur comment ça sera géré à l’avenir sur d’autres produits. »