L’année 2025 marque une nouvelle étape dans l’évolution des surfaces en plant de pomme de terre au sein des six principaux pays producteurs européens (Pays-Bas, France, Allemagne, Écosse, Danemark et Belgique). Le total atteint 106 864,9 ha, soit + 9,5 % par rapport à 2024 (+ 9 297,81 ha). Il dépasse ainsi la barre symbolique des 100 000 ha et le niveau de 2020 (103 385,13 ha). Cette progression est certainement liée à une meilleure valorisation des plants.
Elle s’inscrit aussi dans un contexte économique encore instable, marqué par des coûts de production élevés, une concurrence accrue d’autres cultures plus rémunératrices et un marché mondial des pommes de terre de consommation pour l’industrie et le frais en crise. La nécessité de disposer de plants certifiés demeure toutefois un moteur essentiel ainsi qu’une garantie de qualité sanitaire et de performance agronomique des cultures.
Pour rappel, après une progression régulière jusqu’en 2021, portée par une demande mondiale soutenue et des conditions climatiques globalement favorables, la filière a connu une première inflexion en 2021 et 2022. Celle-ci s’est accentuée en 2023, année marquée par un recul de plus de 6 400 ha. Il était dû à la fois à une météo défavorable, à la flambée des prix de l’énergie et à la pression concurrentielle d’autres cultures jugées plus rentables. Le rebond de 2024 (+ 3 717 ha) et celui de 2025 confirment les efforts réalisés pour redonner de la valeur au plant. La répartition des surfaces a toutefois évolué. Le poids relatif des variétés industrielles est aujourd’hui plus élevé qu’avant 2020, tandis que l’export traditionnel perd du terrain.
80 % des surfaces pour le trio de tête
La répartition géographique reste globalement stable (voir graphe ci-dessous). En concentrant toujours près de 80 % des surfaces, le trio Pays-Bas, France et l’Allemagne illustre la domination de ce bassin historique. L’augmentation des surfaces est observée sur toute l’Europe. Les Pays-Bas maintiennent leur position de leader avec 41 098,6 ha (+ 6,74 %). Ils nous surprennent avec 2 595 ha en plus. Ils continuent à augmenter leurs surfaces de variétés de transformation et redonnent du poids aux variétés libres pour l’export.
La France affiche 24 377,9 ha (+ 9,7 %). Restant le deuxième producteur européen, elle affiche un équilibre entre son marché domestique, l’export vers les pays tiers et l’approvisionnement de l’industrie. L’Allemagne confirme une reprise significative avec 20 449,4 ha (+ 11,31 %). Elle démontre son intérêt renouvelé pour des variétés de transformation résistantes aux maladies. L’Écosse annonce 11 001,6 ha (+ 7,27 %). Sa production est tirée par la demande export et industrielle, mais aussi par des conditions climatiques favorables aux rendements en 2024. Le Danemark est en forte hausse avec 758,5 ha (+ 23,75 %). Son marché industriel s’affiche en expansion et le pays est en recherche active de nouvelles variétés performantes. La Belgique est portée par la spécialisation variétale et sa position stratégique vis-à-vis des usines de transformation. Elle compte 2 478,8 ha (+ 9,53 %).

Les évolutions climatiques, les pressions phytosanitaires, la recherche de meilleures marges, mais surtout l’évolution des marchés de consommation (industrie et frais) guideront sans aucun doute les arbitrages de surfaces dans les prochaines années.
Entrée de Désirée dans le Top 10
Les dix variétés majeures sont cultivées sur 34 102 ha en Europe (30 886 ha en 2024), soit 31,91 % (31,65 % en 2024) de la production globale. Pour la quatrième campagne consécutive, Fontane domine avec 9 283,48 ha en 2025 (8 487,43 ha en 2024), mais la hausse est moins importante qu’en 2024 (+ 796 ha, contre + 1 131,74 ha) (voir graphe ci-dessous). L’augmentation en part relative est la plus forte au Danemark avec + 190,85 % et en Écosse avec 14,41 %, mais c’est bien aux Pays-Bas qu’elle augmente le plus en valeur absolue (+ 298,64 ha). Spunta, deuxième du podium, reprend presque tous les hectares qu’elle avait perdus en 2024 (+ 704 ha en 2025, contre - 713 en 2024), soit une hausse de 12,51 %. C’est aux Pays-Bas que sa progression est la plus marquée avec + 412,69 ha, mais loin de compenser la perte de 778,8 ha en 2024. La France augmente également ses surfaces de près de 200 ha.
Innovator est délogée de sa troisième place par Agria. Cette variété libre de transformation, aussi très demandée à l’export, augmente de 647,35 ha (+ 291,64 ha en 2024, après des baisses de 316,4 ha en 2023 et de 400 ha en 2022). C’est de nouveau aux Pays-Bas que la hausse est la plus sensible avec + 439,23 ha. Innovator est donc rétrogradée à la quatrième place malgré une hausse de 295,59 ha (+ 171,79 ha en 2024, après avoir dégringolé de 401,69 ha en 2023). L’augmentation la plus forte est observée aux Pays-Bas avec + 179,49 ha. Hermes (variété de transformation et export) réussit à maintenir sa cinquième place avec près de 2 000 ha en 2025 (+ 159 ha, + 8,65 %). Elle progresse aux Pays-Bas et en Écosse. Colomba s’accroche également à sa sixième place gagnée en 2024 en gagnant 164 ha (surtout en France avec + 112,17 ha). Elle marque ainsi un peu le pas à la suite de l’augmentation de 223,81 ha en 2024.
Cara gagne une marche et arrive à la septième place en progressant de 291,44 ha, et plus particulièrement en Écosse avec + 231,87 ha. Markies se hisse à la huitième place avec une hausse de 263,95 ha. Elle reprend ainsi des surfaces dans tous les pays sauf en Allemagne où elle perd 6,45 ha. Challenger est éjectée du top 10 pour être remplacée par la variété export Désirée. Elle arrive à la neuvième place en progressant de 187,97 ha, notamment en Écosse (+ 90 ha). Arizona (variété export) continue sa dégringolade et termine à la dixième place après être sortie du top 5 en 2024. Elle occupe 1 297,18 ha en 2025, contre 1 568,63 ha en 2024 (baisse de 271,45 ha), c’est la seule variété du top 10 à voir ses surfaces baisser en 2025.

Ce top 10 comprend ainsi 5 variétés typiquement industrielles (Fontane, Innovator, Markies, Hermes et Agria ; ces deux dernières étant valorisées aussi à l’export), 4 variétés "export" (Spunta, Cara, Désirée et Arizona) et une seule variété du frais, Colomba. Le dynamisme des trois variétés "frites" de ce top 10 explique, à elles seules, 1 355,59 ha de la hausse totale. Dans le même temps, après avoir diminué drastiquement en 2024, les 3 variétés libres "export" augmentent de 1 183,83 ha (et ce, sans compter la part export d’Hermes et d’Agria).
Une demande soutenue en variétés industrielles
Les variétés destinées à la transformation (frites et chips) poursuivent leur progression en 2025. Fontane reste largement en tête, avec une nouvelle hausse significative (+ 9,38 %), consolidant plus que jamais son rôle de référence sur le segment "frites" en Europe. Innovator, Agria et Markies confirment également leur regain de surfaces. Elles profitent d’une demande toujours soutenue des usines, de leur régularité en rendement et de leur bonne adaptation aux différents bassins de production. Agria est également très demandée à l’export sur le sud de l’Europe, mais aussi au Proche et au Moyen-Orient.
Côté « chips », les surfaces augmentent également. Hermes conserve sa position dominante (+ 159 ha), suivie par Lady Rosetta (+ 46,6 ha), toutes deux tirant parti d’exportations régulières vers l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient. Lady Amarilla continue sa progression et passe la barre des 700 ha. Certaines variétés plus récentes, comme O’Claire, continuent de progresser, preuve qu’il existe encore une capacité d’innovation sur ce marché très concurrentiel. Ces gains se font parfois au détriment de variétés historiques, qui peinent à maintenir leur compétitivité face à de nouvelles attentes en qualité et en régularité d’approvisionnement. Par exemple, Lady Claire perd 40,8 ha.
Un renouveau pour les variétés export libres
Le marché des variétés export, marqué par un repli notable des surfaces en 2024, retrouve un nouveau souffle en 2025. Spunta reste la variété leader incontestée et reprend des surfaces dans tous les pays européens. Elle revient ainsi quasiment à son niveau de 2023 (6 345 ha) mais reste loin de son niveau de 2019 (8 040 ha). Cara et Désirée retrouvent aussi des hectares. Les parts exportées des plants de Hermes et Agria expliquent aussi l’augmentation de leurs surfaces. Ceci est le signe d’un regain d’intérêt pour les variétés libres à destination de l’export et contraste avec 2024. Les grandes perdantes sont les variétés protégées export, telles Arizona. Toutefois, la variété protégée française Synergy confirme son essor régulier engagé depuis quelques années, avec 52,55 ha en plus en 2025.
Regain sélectif pour les variétés du frais
Le marché du frais affiche une évolution contrastée. Les variétés à chair tendre telles que Colomba et Agata progressent (respectivement de 9,41 % et 5,03 %). La première renforce sa position de référence, tandis que la seconde continue sa remontée après sa descente à 957,19 ha en 2023 pour afficher désormais 1 093,23 ha. Historiquement plutôt une variété destinée au marché français avec une production de plants en France, Agata affiche ses plus fortes progressions en Belgique (+ 38,61 %) et aux Pays-Bas (+ 17,69 %) alors qu’elle baisse de près de 1 % en France.
En revanche, les variétés à chair ferme continuent presque toutes à reculer. Seule Jazzy parvient à progresser sensiblement (+ 10,33 %), confirmant sa place de leader dans le classement de ce type de variétés et une tendance amorcée depuis trois ans notamment en France (+ 12,56 %) et en Écosse (+ 18,99 %). Allians reprend un peu de couleur, notamment en France grâce aux surfaces en agriculture biologique, mais reste très loin de son niveau historique de 2021 (512,31 ha, contre 279,01 ha aujourd’hui).
Les féculières stabilisées
L’hémorragie des variétés féculières a été stoppée. Les surfaces globales augmentent, mais elles ne sont tirées que par une seule variété, Kuras. Elle augmente de 200,91 ha au Danemark et de 13,46 ha en Allemagne (soit + 214,37 ha, + 25,38 %). Toutes les autres continuent à baisser.