Sous pression financière après une dépréciation du peso, le gouvernement argentin a annoncé lundi la suppression des taxes sur les exportations de céréales et d'oléagineux jusqu'au 31 octobre.
Les produits agricoles (grains, viandes, huiles, etc.) représentent environ 60 % des exportations argentines. Ils sont la principale source de devises du pays, notamment le soja, valorisé en agrocarburant, et le maïs, dont la récolte est attendue en hausse cette année.
La décision du pays latino-américain, qui figure parmi les cinq premiers exportateurs mondiaux de maïs et de soja, a « donné le blues aux opérateurs de marché », résume le cabinet Inter-Courtage. La baisse a touché lundi tous les produits agricoles mais plus fortement les oléagineux (soja, colza, huile de palme...).
La Chine achète argentin
Après ce repli, et alors que la tendance de fond « reste baissière » sur les marchés, les grains s'échangeaient à la hausse mercredi : un rebond essentiellement technique pour les analystes.
A la Bourse de Chicago, le blé a clôturé mardi soir en légère hausse à 5,20 dollars le boisseau (soit 27 kg), le maïs à 4,25 dollars le boisseau (environ 25 kg) et le soja est aussi reparti en hausse à 10,12 dollars le boisseau (27 kg). La tendance était la même en séance mercredi sur Euronext.
Pour Arlan Suderman, de la plateforme de courtage StoneX Financial, la baisse des prix lundi est due à une « association » entre la décision de l'Argentine et « l'absence d'achat de la part de la Chine ».
« Si la Chine avait continué à acheter comme elle le faisait il y a un an, les nouvelles en provenance d'Argentine n'auraient pas eu un tel impact », estime l'analyste, en l'absence d'avancées pour parvenir à un accord commercial entre Washington et Pékin.
Or, rappelle Dewey Strickler, d'Ag Watch Market Advidors, « il n'y a pas eu de livraison de soja des États-Unis vers la Chine depuis la première semaine de juin ».
Dans ce contexte, la suppression des taxes argentines « implique une augmentation de la concurrence en ce qui concerne le soja et le maïs », qui pourrait être défavorable aux produits américains, selon M. Strickler.
L'Argentine vend de la graine de soja, de l'huile et des tourteaux : « la levée des taxes permet aux traders argentins de faire baisser les prix », explique Sébastien Poncelet, analyste chez Argus Media.
« On voit déjà des farmers qui accélèrent leurs ventes de soja. » Juste après l'annonce de Buenos-Aires sur la levée des taxes, des opérateurs chinois ont annoncé l'achat de « 10 Panamax (bateaux capables de transporter environ 60 000 tonnes) de graines de soja argentines pour des chargements sur novembre », a indiqué Inter-Courtage.
Réveil des importateurs de blé
Si tous les oléagineux, notamment l'huile de palme, ont baissé dans le sillage du soja, le colza européen a un peu fait figure d'exception cette semaine: les cours de la graine ont peu varié, soutenus par des facteurs locaux.
L'Europe, qui est le premier importateur mondial de colza, achète traditionnellement en Ukraine (environ 3 millions de tonnes par an, soit plus de 50 % des importations européennes de cette graine) en début de campagne.
Or le flux n'est pas aussi important que d'habitude, explique M. Poncelet, du fait de la mise en place complexe d'une taxe à l'export de 10 % par les Ukrainiens, ce qui a ralentit l'approvisionnement et représenté un « petit soutien pour les prix ».
Du côté des céréales, après de très belles moissons mondiales de blé comme de maïs, « le réveil des pays importateurs stoppe la spirale baissière des prix », relève l'analyste.
L'Algérie, notamment, a passé de nouvelles commandes de plus 500 000 tonnes de blé meunier, d'origine optionnelle mais qui viendra probablement de mer Noire, comme tous ses derniers chargements.
La Turquie se fournit en orges fourragères et le Mexique a acheté via des opérateurs privés près de 123 000 tonnes de maïs américain, selon les rapports d'inter-Courtage.