« Tout le monde retient un petit peu sa respiration », résume auprès de l'AFP Damien Vercambre, du cabinet Inter-Courtage.
Depuis le début de la semaine, le ministère américain de l'agriculture (USDA) a repris, au compte-goutte, la publication de certains de ses rapports jusqu'alors suspendus en raison de la paralysie budgétaire aux Etats-Unis. Que le « shutdown » soit terminé ou non, l'USDA doit ainsi publier vendredi son rapport mensuel sur l'état des stocks et les niveaux de production dans le monde des principales denrées agricoles. « Il s'agira des premières données significatives dont disposera le marché depuis le 30 septembre », relève pour l'AFP Arlan Suderman, de StoneX Financial.
Et si les membres de la Chambre des représentants parviennent à se mettre d'accord pour permettre à l'Etat fédéral américain de reprendre pleinement ses activités - un vote est prévu mercredi -, le ministère de l'agriculture pourra alors reprendre la collecte habituelle de toutes ses données.
Un déblocage permettra « d'avoir des informations un peu plus carrées de la part de l'USDA », note Gautier Le Molgat, PDG d'Argus Media France. Selon lui, les Américains « attendent d'avoir des confirmations sur leurs propres fondamentaux ».
« Si le marché a correctement anticipé » les données du ministère américain de l'agriculture, en s'appuyant notamment sur les chiffres du privé, cela « pourrait ne pas avoir d'incidence » sur les cours, estime Arlan Suderman. Dans le cas contraire, l'analyste s'attend à « une correction importante ».
A la Bourse de Chicago mardi, le blé a clôturé à 5,36 dollars le boisseau (27 kg), le maïs s'est affiché à 4,32 dollars le boisseau (25 kg) et le soja a terminé à 11,13 dollars le boisseau (27 kg).
Les achats chinois en attente
« Il y a eu une petite vague d'excitation » la semaine passée, face à la promesse chinoise de revenir aux achats de soja américain, rappelle Damien Vercambre, ce qui a notamment poussé les prix du soja à Chicago.
La Maison Blanche a assuré que Pékin avait accepté d'acquérir au moins 12 millions de tonnes de soja américain au cours des deux derniers mois de 2025, en plus de lever des droits de douane sur des produits agricoles américains, dont le soja.
Mais désormais, le marché « attend de voir si ça se concrétise véritablement », note Gautier Le Molgat. D'autant que l'ampleur de la promesse reste bien inférieure aux achats habituels de la Chine, qui dépassaient ces dernières années les 20 millions de tonnes annuelles.
« On a eu l'impression aussi que les Chinois se rapprochaient des Américains pour faire baisser les prix brésiliens (...) c'est un peu du poker », ajoute Damien Vercambre.
Pékin est le plus grand importateur de soja au monde. Les tensions commerciales avec les Etats-Unis l'ont poussé à se rapprocher davantage d'autres pays exportateurs, tels le Brésil.
Sur Euronext, les cours du blé se retrouvent quelque peu sous pression dans un marché de plus en plus compétitif, selon M. Le Molgat, et s'affichent mercredi autour de 190 euros la tonne sur l'échéance de décembre, la plus échangée.
« L'Argentine risque d'être présente assez rapidement sur la scène internationale à l'export », note l'analyste, avec des projections de récolte de blé quasi-record. En parallèle, « le marché français s'est un petit peu ajusté à la baisse en intégrant des variations liées (...) à la remontée de l'euro face au dollar », ajoute M. Le Molgat.
Une devise trop forte est susceptible de pousser les opérateurs à se tourner vers des denrées libellées dans une monnaie dont le cours est plus faible.