Sarrasin : entre intérêts écologiques et réalités économiques

Sarrasin variété Harpe
La variété harpe est la principale variété cultivée en France. Sa tardivité garantit le potentiel de rendement mais pose quelques défis pour les producteurs. (©Hélène Sauvage)

« Les cultures à bas niveau d’impact, comme le sarrasin sont des solutions intéressantes pour réduire nos impacts, mais elles doivent être rémunératrices pour les agriculteurs qui s’engagent », résume Emmanuel Bridron, agriculteur et élu à la Chambre d’agriculture de l’Eure-et-Loir, à l’occasion d’une journée technique organisée le 11 septembre 2025 à Orsonville.

La préservation de la ressource en eau est un enjeu de taille pour le territoire eurélien. Sur le département, pas moins de trente aires d’alimentation de captages (AAC) classées comme prioritaires au titre du Grenelle sont recensées. Elles représentent 250 000 ha de SAU sur un total de 400 000 ha, rappelle Thierry Savoie, responsable agronomie à la Chambre d’agriculture du département.

Les agences de l’eau travaillent de concert avec les agriculteurs et les collectivités afin de minimiser les pollutions diffuses associées aux nitrates et aux produits phytosanitaires, et le sarrasin semble prometteur : « après 2 années de culture, on parvient à faire baisser de 30 % les nitrates dans les eaux de captage. Par ailleurs, cette culture affiche un IFT total de 0,8 et ses effets allopathiques limitent aussi le recours aux herbicides sur les cultures suivantes », commente Léo Berte, chef de service protection de la ressource à la Métropole de Chartres.

Des vrais atouts agro-environnementaux sur l’exploitation

Implanté au printemps et récolté en début d’automne, le sarrasin est une culture à cycle court qui ne requiert que très peu d’intrants. Il couvre efficacement le sol et joue pleinement son rôle de piège à nitrates et les agriculteurs euréliens en sont convaincus : « sur le plan agronomique, le sarrasin est une très bonne tête de rotation, permettant d’introduire une espèce de printemps dans l’assolement. On ne lui connaît pas de ravageurs et de maladies, elle couvre très vite le sol et elle laisse les parcelles très propres pour les cultures suivantes ! Et cerise sur le gâteau, c’est une plante mellifère très appréciée des abeilles en fin de saison ! », détaille Eugène Fabien, agriculteur à Ymonville (28) près de Cloyes. Son collègue du pays chartrain n’est pas moins disert sur ses qualités « j’adore cette plante qui fleurit à la moisson, elle est bien adaptée à mon système en semis direct, elle m’évite de sortir le pulvérisateur et la gestion des adventices pour les céréales à suivre n’en est que plus simple ».

Une rémunération jugée insuffisante

Mais l’affaire serait trop belle si tout était aussi rose. Certes, le sarrasin est peu gourmand en intrants, mais nécessite quand même un peu de technicité au moment de la récolte. Plusieurs options possibles, d’abord un fauchage puis un andainage pour faire sécher la plante, elle sera alors moissonnée environ une semaine plus tard. D’autres font le choix de la moissonner directement, ce qui nécessite un séchage rapide après récolte. Cette étape de séchage indispensable peut s’avérer être un vrai casse-tête logistique pour ceux qui passent par les OS, car elle coïncide avec celle du maïs.

Autre souci technique, la contamination au prosulfocarbe utilisé pour les désherbages d’automne des céréales. Du côté de la sélection variétale, les recherches s’orientent vers des variétés plus précoces. Mais, Stéphane Gilles, assistant sélectionneur chez Agri-Obtentions rappelle que les investissements restent modestes en termes de sélection (seulement 40 000 ha en France). Par ailleurs, la littérature, en termes de description génétique et d’itinéraire technique, est peu fournie.

La rémunération reste un enjeu de taille pour les agriculteurs. « Les charges opérationnelles sont faibles, mais les prix spot sont volatils et souvent inférieurs à 1 000 €/t en conventionnel. Un prix jugé trop faible au regard des risques. Avec un rendement moyen de 15 à 25 q/ha, la rentabilité est insuffisante », témoigne Fabien Eugène.

Le sarrasin a de réels atouts à faire valoir sur le plan agronomique et écologique. Par ailleurs, le marché de la demande est dynamique. Il est nécessaire que la filière se structure pour sécuriser les débouchés et garantir un sourcing français. Sur le terrain, les producteurs semblent convaincus des bienfaits de la culture, mais la faible rentabilité de la culture à ce jour les pousse à rester prudent.

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