Santé du sol et des plantes : « Gérer les causes et non les conséquences »

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Installé en France depuis 1987 sur une exploitation du sud de l’Oise, « j’ai commencé dans un système tout à fait classique, avec une rotation composée de céréales, pois protéagineux et betteraves sucrières », présente Alfred Gässler.

Avec des sols à faible teneur en matière organique, il cherche rapidement à arrêter le labour et se tourne vers les techniques culturales simplifiées (TCS), ayant l’habitude de ces méthodes en Allemagne.

En semis direct depuis 1997

« On a constaté les effets bénéfiques des couverts végétaux sur le système mais ils ne se marient pas forcément très bien avec les TCS. Après plusieurs années d’essais, on a donc décidé de partir sur le semis direct et de renforcer notre engagement sur les couverts végétaux. Ainsi, l’exploitation est en semis direct intégral depuis 1997, excepté quelques rares recours au travail du sol, mais aucun dans les dernières années ».

L’assolement a, lui aussi, été modifié : il se compose de céréales, colza, maïs grain et pois ou féverole d’hiver. « J’ai arrêté la betterave sucrière. Ayant vendu des semoirs de semis direct brésiliens pendant plusieurs années dans toute la France, c’était compliqué de gérer correctement les désherbages avec les déplacements », précise Alfred Gässler.

Les agriculteurs ont également intégré les couverts permanents. « On essaie de semer des couverts dès le printemps dans la culture pour qu’ils soient déjà présents à la récolte et qu’ils se développent rapidement. Parce qu’on constate avec le changement climatique, que semer des couverts après la récolte peut être très compliqué parfois, si le sol est déjà desséché. »

« La plante qui nourrit le sol et le sol qui nourrit la plante »

Avec l’arrêt des ventes de semoirs en 2013, « j’ai eu plus de temps pour être présent sur la ferme. Nous sommes partis notamment en formation en Autriche avec deux autres agriculteurs pour en savoir plus sur la chromatographie ».

« C’est, en fait, une photographie du sol exprimée sur du papier filtre, qui permet d’évaluer la qualité biologique, d’apprécier le fonctionnement ou le dysfonctionnement de la vie biologique afin de faire un état des lieux et un suivi dans le temps ».

« À cette époque-là, les images que l’on a sorties de nos propres sols se sont révélées plutôt frustrantes. Malgré le semis direct et les couverts végétaux, ce n’était pas encore ça… Et c’est là qu’on a commencé à s’intéresser davantage à la nutrition des plantes, d’abord via des analyses de matière sèche avec des laboratoires en Allemagne, puis aux États-Unis, puis avec les analyses de sève de la plante (laboratoire aux Pays-Bas). »

« On commence maintenant à voir réellement les changements sur le comportement du sol. Notre réflexion actuelle, c’est qu’il faut que la plante soit en bon état pour qu’elle puisse nourrir le sol à travers ses exsudats racinaires, tout en conservant la production de graines… Si le sol n’est pas nourri à travers les plantes et leurs sucres (plutôt que du compost ou des déchets, etc.), les bactéries et les champignons du sol ne peuvent pas vivre correctement », estime Alfred Gässler.

« Un ha de maïs « en mauvaise forme » va générer seulement 100 m3/an d’exsudats racinaires (Sauerbeck und Johnen, 1976), alors qu’un ha de maïs « bien en forme » pourra en produire près de 1 000 m3/an (Samtsevich, 1968). Les plantes apportent le carbone, les sucres, l’énergie. Cela sert de source de carburant et de substrat pour les populations microbiennes, qui construisent de la matière organique, minéralisent les nutriments et les rendent disponibles aux plantes. »

« C’est pour ça aussi aujourd’hui qu’on essaie de couvrir le sol en permanence, avec des plantes performantes, qui donnent une partie de leur énergie au sol, pour que le sol puisse à son tour nourrir les plantes ensuite. »

« La méthode des bilans est dépassée »

Pour Alfred Gässler, « la méthode des bilans est dépassée. Plus personne ne travaille aujourd’hui avec le Minitel, tout le monde a des smartphones. Mais en agriculture, on fonctionne encore comme mon père a travaillé… Il faut arrêter de regarder uniquement l’azote, le phosphore et le potassium… mais plutôt considérer l’ensemble des éléments minéraux ».

« Il faut analyser, déterminer pour chacun s’il y a des excès ou des carences et les corriger afin que la plante fonctionne correctement. » L’agriculteur compare les feuilles d’une plante à un panneau photovoltaïque : « si elles sont couvertes, elles n’ont pas un bon rendement. Ainsi, quand elles n’ont pas tous les éléments nécessaires dans un bon équilibre pour effectuer leur photosynthèse, elles ne peuvent pas produire correctement. ».

« Un déséquilibre conduit à une sensibilité accrue des cultures aux maladies et aux attaques parasitaires. Pour éviter les insectes dans le blé en fin de cycle par exemple, il faut éviter l’azote de fin de cycle sans s’assurer d’avoir à disposition de la plante de quoi fabriquer sa protéine : Mg — S — Mo. »

L’idée : « gérer les causes et non les conséquences. Une carence, on ne peut pas la deviner. Les symptômes visuels peuvent aider, mais ils ne sont pas toujours faciles à identifier ou bien ils apparaissent tardivement, quand le potentiel de rendement de la culture est déjà affecté… Pour éviter cela, la seule analyse valable aujourd’hui est l’analyse complète de sève de la plante », estime Alfred Gässler.

« Augmenter la teneur en magnésium permet, par exemple, de réguler un excès en azote. Il est important toutefois de comprendre la cause de cet excès pour les années à suivre. » Comme le montre le schéma ci-dessous, « chaque élément minéral qui est dans un quart de même couleur va directement influencer l’absorption des autres de cette couleur. Si un élément est élevé, alors l’absorption d’un autre élément sera limitée. »

(© Gässler SAS)

L’analyse chimique du sol avec Kinsey-Albrecht permet de « voir ce que le sol peut fournir à la plante. C’est une base, qu’on peut répéter tous les 3-4 ans pour un suivi des évolutions. Attention : ce qui est dans le sol n’est pas forcément disponible pour la plante ». « Et à côté, les analyses de sève des plantes permettent une gestion à l’année. »

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