Associer les cultures : une stratégie gagnante contre les bioagresseurs

Semis direct sous couvert
Le projet AssoProtect vise à identifier les associations de cultures les plus efficientes pour la protection des grandes cultures. (©Mathieu Bonnehon/Banque d'images FranceAgriTwittos)

Le colza semé avec des plantes compagnes telles que les légumineuses (féverole, trèfle d’Alexandrie ou lentille) constitue l’association la plus documentée avec 41 % des références étudiées par les chercheurs. « Une biomasse de couvert suffisante à l’automne perturbe la localisation du colza par les altises », résume Lola Serée, chargée de mission agriculture biologique pour la Chambre d'agriculture des Pays de la Loire, et référente du projet AssoProtect. Cette initiative vise à identifier les associations de cultures les plus efficientes pour la protection des grandes cultures, en agriculture biologique et conventionnelle. Les chercheurs ont compilé 152 références bibliographiques, et mené une enquête de terrain auprès d’agriculteurs et de conseillers.

Sur 149 producteurs de colza interrogés, 70 utilisent l’association du colza avec une légumineuse pour réduire la pression des ravageurs, mais aussi pour faire l’impasse sur un passage d’herbicide. L’effet sur le rendement reste généralement neutre : les plantes compagnes gèlent en hiver et ne concurrencent plus le colza au printemps. Mais cela signifie également que l’association ne protège pas le colza des attaques de ravageurs de printemps, tels que les méligèthes. La moitié des exploitants utilisant l’association de plantes avec le colza estiment que le premier frein est le coût de la semence, et 40 % dénoncent un frein technique : la gestion des adventices. En effet, en conventionnel, l’adaptation du désherbage chimique à la présence d’une plante compagne demande des ajustements. En bio, c’est la gestion mécanique des adventices qui se complique. Si les effets positifs du colza associés sont bien connus, la technique ne concerne que 12 % des surfaces de colza.

Céréales et protéagineux : la complémentarité utile

L’association céréales-protéagineux (blé-pois, orge-féverole…), compte pour 37 % des références étudiées. Ces associations ont surtout l’intérêt, pour les polyculteurs-éleveurs, d’enrichir la ration en protéines ou d'améliorer la teneur de la céréale. Mais les effets sur les bioagresseurs ne sont pas négligeables. Les essais montrent une diminution de la biomasse de l’ordre de 30 %, sans réduction du nombre d’espèces présentes.

Autrement dit, les adventices lèvent, mais se développent moins. Le projet Iciba, conduit en Centre-Val de Loire, a mis en évidence un effet positif sur les pucerons lorsque la plante associée est implantée avant la céréale : elle masque les signaux visuels et olfactifs utilisés par les ravageurs pour localiser leur hôte. Les effets sur les maladies restent encore à préciser. Les associations céréales et protéagineux occupent 13 % des surfaces de grandes cultures bio, soit 75 000 ha, mais seulement 1 % des surfaces céréalières françaises.

Les légumineuses pluriannuelles : réduction des adventices, azote et structure du sol

Les céréales peuvent aussi être associées à des légumineuses pluriannuelles (trèfle, luzerne). Sur 179 agriculteurs qui produisent des grandes cultures, seuls 20 y associent des légumineuses pluriannuelles. Ils y voient plusieurs avantages : une réduction de l’ordre de 20 % de la biomasse adventice, grâce à la couverture permanente du sol, un apport en azote, une meilleure structure du sol, et un fourrage complémentaire.

L’impact sur les ravageurs et maladies reste peu étudié, mais les retours de terrain sont encourageants, d’après les chercheurs d’AssoProtect. Pour un tiers des répondants, cette association permet de réduire le nombre de passages phyto.

Lentilles : les céréales apportent un effet tuteur

Une quinzaine d’études seulement évoque la lentille associée, souvent avec de la caméline, mais aussi du blé, de l’avoine, de l’orge de printemps. Cette pratique montre des résultats prometteurs : outre la maîtrise des adventices et la possibilité systématique de faire une double récolte, c’est surtout l’effet tuteur qui attire les agriculteurs.

Sur 20 producteurs de lentilles, la moitié l’associent à une céréale. « Dans les années très humides, comme 2024, la culture associée a réduit la verse et limité la propagation des maladies », précise Lola Serée. Pour compléter les références sur l’association lentilles-céréales, des essais en micro-parcelles ont été menés en Eure-et-Loir, Bretagne et Charente-Maritime pendant deux ans.

Des pratiques encore freinées par la complexité

L’enquête menée auprès de 206 agriculteurs met en évidence un fort intérêt pour la pratique de l’association, mais aussi des réticences. La complexification de l’itinéraire technique revient dans la majorité des critiques avancées par les exploitants : complexité de la gestion des adventices, composition de la récolte imprévisible, réglage du semoir, tri nécessaire à la récolte.

Pour accompagner la diffusion, les partenaires du projet ont mis en ligne des fiches pratiques et témoignages détaillant les itinéraires de semis, les espèces adaptées, et les ajustements nécessaires selon le système. Le tableur Excel compilant les 152 références permet de filtrer par région, type de bioagresseur ou service recherché. Les prochains résultats d’AssoProtect, attendus d’ici la fin de l’année, devraient affiner les références régionales et outiller davantage les producteurs.

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