Après plus de deux ans de navette parlementaire et après le vote des sénateurs d'une petite loi en deuxième lecture le 12 mai 2016, voici ce que dit l’article 51 quaterdecies de la loi sur la biodiversité, qui envisage l’interdiction des néonicotinoïdes.
« I. – Au plus tard le 31 décembre 2016, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail établit le bilan bénéfice-risque des usages des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes autorisés en France, par rapport aux produits de substitution ou aux méthodes disponibles. »
« Ce bilan porte sur les impacts sur l’environnement, notamment sur les pollinisateurs, sur la santé publique, sur l’activité agricole et sur les risques d’apparition de résistance dans l’organisme cible. »
« II. – Au plus tard le 1er juillet 2018, sur la base du bilan mentionné au I, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail interdit les usages des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes pour lesquels les méthodes ou produits de substitution ainsi identifiés présentent un bilan plus favorable. »
« III (Nouveau). – Après le 1er juillet 2018, dès lors que l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail a connaissance ou est saisie d’une nouvelle méthode ou d’un nouveau produit de substitution à un produit phytopharmaceutique contenant une substance active de la famille des néonicotinoïdes, elle conduit un bilan bénéfice-risque dans les conditions mentionnées au I. Dans un délai maximal de quatre mois, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail interdit les usages des produits phytopharmaceutiques contenant des substances actives de la famille des néonicotinoïdes pour lesquels les méthodes ou les produits de substitution ainsi identifiés présentent un bilan plus favorable. »
Faute d’alternative, une baisse importante des surfaces
Selon l’AGPB, l’association générale des producteurs de blé, l’interdiction des néonicotinoïdes souhaitée par bon nombre d’élus attise de fortes inquiétudes de la part des agriculteurs utilisateurs. Ainsi, selon un sondage BVA commandé par le syndicat, 85 % des producteurs de betteraves, 73 % des producteurs d’orge et 77 % des producteurs de pommes s’attendent à des conséquences importantes pour leurs productions.
Pour les producteurs de grandes cultures, les craintes sont de deux ordres. D’abord, les deux tiers des producteurs craignent des pertes de rendement et de productivité. Et ils sont davantage à considérer que l’interdiction engendrera des risques pour l’environnement, puisque les néonicotinoïdes limitent l’usage d’insecticides du sol ou foliaires. La majorité des agriculteurs concernés estiment ainsi qu’ils seraient amenés à pulvériser de manière répétée des insecticides. Autant dire que le sens agro-écologique d’une telle interdiction n’est pas si évident.
Selon le même sondage, les deux tiers des producteurs estiment qu’il n’y a pas de solutions alternatives à l’utilisation des néonicotinoïdes qui soient aussi efficaces qu’avec ces produits et 19 % disent ne pas savoir s’il en est d’aussi efficaces. Dans les 14 % restants qui estiment qu’il en existe, 6 % pensent à l’utilisation d’autres produits phytosanitaires.
Ainsi, faute d’alternatives efficaces, 59 % des producteurs d’orge et 51 % des producteurs de betteraves seraient amenés à réduire leurs surfaces cultivées. 14 % de ces producteurs arrêteraient complètement ces deux productions.
« Une interdiction des néonicotinoïdes provoquerait une importante réduction des surfaces d’orge d’hiver, explique Philippe Pinta, président de l’AGPB. Elle pourrait remettre en cause cette culture en France. »
Lors des trois dernières campagnes culturales, 86 % des producteurs ont utilisé des semences d’orge d’hiver enrobées de produits à base de néonicotinoïdes.