Il a testé les couverts d’été en interculture courte

Couverts végétaux
Photo d'illustration. « Le couvert en interculture courte est complexe parce qu’on est contraint par un calendrier, il faut à la fois bien réfléchir aux conditions d’implantation, à la composition de son couvert et aussi aux conditions de destruction », met en garde Youness Lahia, conseiller agronomie. (©Terre-net Média)

Jusque-là, le système était très classique, sans grosses charges de mécanisation et fonctionnait bien : labour régulier, trois déchaumages au disque l’été, semis au semoir-combiné derrière un passage au cultivateur. « Plus ça allait, plus on diminuait la profondeur de travail », rapporte Gaël Bedouet. Reste que la matière organique du sol s’amenuisait au fil du temps, et les cultures se salissaient de plus en plus. Cette exploitation de 180 hectares est uniquement céréalière, toutes les pailles sont exportées à des voisins, l’été les terres étaient donc nues après la moisson de blé.

« Je me suis intéressé au semis direct pour avoir moins de travail du sol, raconte l’agriculteur. Mais je ne voulais pas faire cela sur sol nu parce que pour moi, cela ne fonctionne pas, il faut de l’azote ». Pour ramener de l’azote dans le sol, il faut implanter des légumineuses. Ainsi germe l’idée de semer des couverts d’été en interculture courte.

Il s’achète cette année un semoir à dents d’occasion et environ deux semaines après la moisson, le 8 août, il implante son couvert sur 11 hectares. Un couvert de luxe à 70 €/ha, constitué de phacélie, radis chinois, sorgho, tournesol, féverole, pois et vesce, pas moins de sept espèces différentes. Les légumineuses pour l’azote, le sorgho pour le volume, le radis chinois pour structurer le sol et le tournesol parce que c’est joli et ça fait venir les abeilles.

« Je ne voulais pas mettre de moutarde parce que c’est de la même famille que le colza, ça ne casserait pas le cycle des bioagresseurs ». L’objectif du couvert, c’est d’apporter de la matière pour protéger le sol, ramener de la vie et concurrencer les adventices : « Un sol nu qui se réchauffe au soleil, le ver de terre ne va pas rester là ! ».

Le choix des espèces dépend des objectifs que se fixe l’agriculteur. « On regarde ce que l’on a comme outils à disposition, et on compose son couvert en fonction de ses objectifs, détaille Youness Lahia, conseiller agronomie à la chambre d’agriculture des Pays de la Loire. Chez Gaël Bedouet par exemple, il s’agissait de restituer de l’azote au sol. « Le couvert en interculture courte est complexe parce qu’on est contraint par un calendrier, il faut à la fois bien réfléchir aux conditions d’implantation, à la composition de son couvert et aussi aux conditions de destruction qui est une étape clé qui exige notamment de respecter la réglementation », met en garde Youness Lahia.

Moins de biomasse que prévu et du mouron rampant

À l’EARL Bedouet, le couvert a bien levé cet été grâce à l’humidité résiduelle, mais il a ensuite manqué de chaleur. Trois semaines avant le semis de sa céréale d’hiver, il était à 2,2 tonnes de matière sèche, deux fois moins qu’espéré. « Je rêve de semer dans un couvert où l’on ne voit pas le tracteur », songe le céréalier.

Initialement, il voulait semer son orge d’hiver en direct dans son couvert. Seulement, quelques adventices se sont invitées dans la parcelle, notamment du mouron rampant, pas le plus sympathique. Alors dès que le semoir a pénétré dans le champ cela a commencé à bourrer. « Cela faisait des paquets derrière, il n’y avait rien à faire, alors j’ai décidé de broyer. Mais ça n’a toujours pas marché, alors j’ai été obligé de passer un coup de déchaumeur à disques indépendant, et là ensuite j’ai pu semer mon orge, il était temps puisqu’on était autour du 20 novembre. Mais du coup ce n’était pas du semis direct ».

« Je débute ! » s’excuse le céréalier, qui semble être le seul de sa commune à avoir implanté un couvert en interculture courte en semis direct sur toute sa surface. Les couverts ont tout de même restitué de la matière organique, de quoi nourrir les vers de terre. « Ce qui est dommage, c’est d’avoir dû passer un coup de broyeur puis un coup de disque et enfin un coup de glyphosate, alors que le couvert m’avait coûté 70 € ! Regrette Gaël Bedouet. Cela m’a finalement coûté plus cher et plus de temps de travail que prévu ».

26 unités d’azote restituées

Le principal objectif visé, la restitution d’azote semble en tout cas avoir été à peu près atteint. Les couverts ont piégé 75 unités d’azote par hectare et en ont restitué en théorie 26. Ce sont autant d’unités achetées en moins au moment de la fertilisation de la culture suivante. Soit environ 35 €/ha économisés. « Si j’avais eu deux fois plus de biomasse, j’aurais économisé près de 100 euros par hectare, ce n’est pas du tout négligeable ! », évalue-t-il. Mais les couverts ont un coût, même en produisant soi-même sa semence.

« En fait, il ne faut pas y aller à l’arrache, songe-t-il encore. C’est un investissement qui coûte, qui ne se voit pas à court terme ». Et c’est bien cela le problème. A quoi bon investir dans un couvert qui ne sera en place que quelques semaines ? « Le couvert en interculture courte est un levier intéressant d’un point de vue technique, agronomique, pour améliorer la qualité du sol, pour apporter des éléments nutritionnels à la culture suivante et lui permettre de mieux se comporter face aux bioagresseurs », argumente Youness Lahia.

Sur son exploitation d’Angrie, Gaël Bedouet a semé une première graine, il va poursuivre le travail cette campagne, « c’est systématique je sèmerai un couvert sitôt la moisson faite, je ne déchaumerai plus jamais, fini le travail en plein l’été ». Cette fois, il y investira moins d’argent, toutes les semences seront produites sur sa ferme, y compris le sorgho. Il garde le cap, celui de passer en agriculture de conservation des sols (ACS). « La portance des sols, c’est le premier changement que l’on constate, en agriculture de conservation, s’enthousiasme-t-il. On économise de la main d’œuvre, des coûts de carburant et de mécanisation ». Mais il faut s’accrocher, « ce qui est difficile, c’est d’accepter les résultats mitigés les années où l’on manque de trésorerie, et aussi d’affronter le regard des autres ».

NB : Article publié initialement le 27 décembre 2024.

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