Au terme d’une année marquée par des niveaux élevés de prix et une forte volatilité, quels conseils de commercialisation donner aux agriculteurs ? C’est la question que nous avons posée à Antoine Pissier, président de la Fédération du négoce agricole (FNA).
« Le premier des conseils, c’est surtout de modérer ses sentiments par rapports à ce marché devenu très électrique et qui réagit au quart de tour » explique-t-il, évoquant le bond puis la chute du blé à la Toussaint, quand la Russie a décidé de se retirer de l’accord sur les exportations de céréales ukrainiennes.
Il souligne aussi l’importance « de raisonner en termes de résultats, de rentabilité, de performance économique des exploitations », de façon à pouvoir « prendre son prix de vente par rapport à son coût de revient et décider très régulièrement si on arrive à un prix d’objectif cohérent par rapport à son objectif de pilotage de l’exploitation ».
Côté achats aussi, « face à la volatilité très importante, notamment des engrais » de ces derniers mois et « aux difficultés d’approvisionnement qui ont existé en engrais et qui existent aussi en semences ou dans la protection des plantes », il insiste sur deux enjeux : « prendre position sur les marchés par rapport à un prix d’achat ou à un prix de vente », mais aussi « prendre position par rapport à une disponibilité de produits ».
En 2022, « un besoin colossal en trésorerie pour les entreprises de négoce »
Antoine Pissier revient aussi sur l’année 2022, « particulièrement rock’n’roll sur les marchés avec la guerre en Ukraine » après « deux années très difficiles qui ont aussi remis en avant le rôle du négoce dans la chaine alimentaire ».
La volatilité et la hausse généralisée des prix ont généré « un besoin colossal en trésorerie pour les entreprises de négoce », notamment « au niveau des dépôts de garantie déposés quand on va se couvrir sur le marché à terme » et aussi parce que « dans un marché qui monte, on a des appels de marge tous les jours pour compenser ces hausses de matières premières ». Face à cette problématique, le négoce a pu compter sur les banques, via des Prêts garantis pat l’État (PGE).
Autre impact : « quand on achète des produits d’appro, il faut forcément les financer avant de les vendre, et un engrais qui vaut 300 €/t est plus facile à financer un engrais qui en vaut 800 ou 1 000 €/t ! ». Côté céréales, « on stocke toute l’année » et « du blé à 150 ou 200 €/t coûte forcément moins cher à financer que du blé à 250 ou 300 €/t voire plus comme on a connu sur une partie de l’année 2022 ».
Il évoque enfin la problématique réglementaire rencontrée par le secteur en 2022 : « La loi Egalim 2 nous a posé des difficultés d’adaptation », résume-t-il, évoquant des dispositions réglementaires qui « ne prennent pas en compte les spécificités de notre métier, notamment sur le marché des céréales ». Si bien que la FNA a dû « batailler dur avec le gouvernement pour pouvoir ou espérer avoir des assouplissements pour reconnaitre vraiment ce qui est fait et qui fonctionne déjà au niveau de la filière ».