110 décès en agriculture liés à un accident chaque année en France, selon les données du ministère, 44 % des victimes ayant moins d’un an d’ancienneté, l’utilisation d’un matériel étant la deuxième cause identifiée entre 2019 et 2023, d’après celles de la MSA : ces chiffres sont à la fois éloquents et alarmants. Sur la route, en 2024, 267 accidents ont impliqué un tracteur et provoqué 50 décès, soit 19 tués pour 100 accidents de tracteur contre 6 pour les autres véhicules (source : Observatoire national interministériel de la sécurité routière 2024).
En Bretagne, les accidents du travail en agriculture, avec arrêts de travail, sont en hausse de 9 % entre 2018 et 2023, l’équivalent de 3 770 accidents dont 37 % chez les moins de 30 ans (source : Chiffres clés 2023 - La sinistralité — régime agricole — octobre 2025, MSA Armorique et Portes de Bretagne, exploitation ORS Bretagne, CROCT Bretagne).
19 tués pour 100 accidents de tracteur (contre 6 pour les autres véhicules).
Toutes les générations sont concernées mais, comme l’illustrent ces statistiques, les jeunes sont particulièrement exposés. « Avec le développement de l’apprentissage, on constate plus d’accidents du travail », argue Jean-Claude Foucraut, président de la commission employeurs de la FRSEA de Bretagne. Selon les MSA bretonnes, le nombre d’accidents du travail (avec ou sans arrêt) chez les apprentis a presque doublé sur la même période, passant de 146 à 285.
Le tracteur particulièrement accidentogène
Responsable tous les ans de lésions graves voire mortelles, le tracteur est l’un des équipements les plus accidentogènes. À côté de ces dégâts corporels, pouvant être irrémédiables, les arrêts de travail qui en découlent ont des répercussions sur les exploitations, notamment économiques et en termes d’organisation. Pour prévenir les accidents, de tracteur en particulier, la profession a lancé début novembre en Bretagne « une campagne de sensibilisation inédite » sur les risques professionnels en agriculture.
Elle cible les élèves de l’enseignement agricole, pour leurs stages et apprentissages, et avant leur installation en agriculture ou leur embauche en tant que salariés agricoles, ainsi que leurs professeurs, encadrants, et les agriculteurs embauchant de la main-d’œuvre pour qu’ils sécurisent l’environnement professionnel et fassent de la prévention.
Baptisée « Vigilance en tracteur : la sécurité, c’est pas une option », parce que « ce sont des règles à appliquer et à transmettre au quotidien, prescrites par l’employeur et qui doivent être appliquées par tous », elle doit durer six mois et se veut « directe, ancrée dans le réel, pédagogique et ludique », explique dans un communiqué de presse la FRSEA, qui porte cette opération. C’est pourquoi les jeunes ont été associés au projet. La classe de BTS Acse du CFTA — MFR de Monfort-sur-Meu a ainsi aidé à l’identification des risques et à l’élaboration des messages à véhiculer.
Réfléchir aux pratiques et responsabilités
Deux « ateliers créatifs » ont permis aux élèves de « travailler sur des punchlines et des projets de visuels », puis « de tester et valider les messages, formats et visuels créés ». Ils ont même participé à des vidéos pour attirer l’attention sur « un moment d’inattention, une frayeur, un accident qu’ils ont vécu » ou dont ils ont été témoins, ou à l’inverse « un bon réflexe » à adopter pour éviter ou réagir à ces situations. Le personnel éducatif et les employeurs sont aussi invités à témoigner. Un appel à témoignages, vidéo et écrit, a d’ailleurs été diffusé pour obtenir ces retours d’expérience.
Un exemple de visuel choc :
Et de vidéos réalisées : Évan, jeune salarié agricole, était au volant d’un ensemble tracteur-épandeur à fumier. Un défaut d’attention et une ligne à haute tension lui est tombée dessus. Il raconte.
Trois sont d’ores et déjà publiées sur le web dédié, www.securite-tracteur.fr, qui regroupe également les ressources et outils, et les réseaux sociaux (Instagram et TikTok, entre autres, sur lesquels les jeunes sont présents) « avec les hashtags #JeMeSuisFaitPeur et #TeamSecuriteTracteur pour qu’elles soient partagées ». Les enseignants et encadrants disposent d’un kit de communication : une signature « Encadrer, c’est aussi protéger », des visuels, affiches, kakemonos, stickers, ressources et messages à poster sur Facebook et LinkedIn. Les jeunes ont accès aux vidéos, punchlines et à des quiz.
#JeMeSuisFaitPeur
La FRSEA veut « interpeller et faire réfléchir les professionnels sur leur responsabilité en la matière et les élèves sur leurs pratiques ». Les causes des accidents en agriculture sont nombreuses. Parmi celles mises en avant par les jeunes : l’usage du téléphone, la consommation d’alcool, la fatigue, le gabarit des engins, la prise de force, la proximité des lignes électriques, les angles morts, la descente en marche avant, l’oubli de la ceinture de sécurité. Sachant qu’il y a aussi : l’excès de confiance, la précipitation, la distraction, la méconnaissance des consignes de sécurité, l’environnement de travail mal sécurisé.