Lorsque, au tournant des années 2000, Valère Pinson a décidé, avec son beau-père, de se lancer dans la production de plants de pommes de terre, l’enjeu pour les deux hommes était de se positionner sur une culture de diversification apportant de la valeur ajoutée. Un an plus tôt, il était arrivé en tant que salarié sur l’exploitation de sa belle-famille. Avec ses 310 ha cultivés en blé, orge et colza, elle se contentait alors d’un assolement très représentatif de son secteur d’Eure-et-Loir.
« L’époque était compliquée, se souvient-il. Le blé se négociait parfois à seulement 60 francs du quintal. » L’intérêt pour le plant a grandi assez naturellement. « Mon beau-père avait de la famille dans l’Eure qui en produisait de longue date. Nous sommes donc allés nous renseigner, d’abord au Sival à Angers, où nous avons rencontré les représentants de France Obtention, ensuite auprès de Philippe Laty, directeur du Comité Centre et Sud, et enfin auprès d’un collecteur qui pouvait nous confier des variétés à produire. »
Le temps de s’équiper en matériels de plantation, de récolte et d’irrigation, les deux hommes, aidés d’un salarié, ont démarré en 2001 avec 5 ha. « Heureusement, nous avons été parrainés par Éric Fallou et sa société Beauce Plants de Bonneval (Eure-et-Loir). Autrement, nous n’aurions jamais pu démarrer. Nous ne disposions alors ni de matériels de calibrage-triage, ni de stockage frigo, ni d’équipements de conditionnement. » Valère Pinson mentionne aussi l’accompagnement étroit des équipes techniques du Comité Centre et Sud pour la constitution de son projet.

Une rapide montée en régime
Dès la deuxième année, le collecteur Desmazières lui a concédé une surface de 22 ha de multiplication. Pour accompagner cette rapide montée en régime, les investissements dans une infrastructure à la hauteur ont suivi et Valère Pinson s’est formé. « J’ai eu la chance d’avoir trouvé une filière très structurée grâce à ses organisations de producteurs. Elle nous suit, nous conseille et nous apporte des solutions techniques. Sans elle, nous n’aurions pas pu nous développer », se félicite-t-il. En même temps que l’agriculteur s’investissait dans la production de plants, il a pris sa part dans la défense de la profession. Dès 2004, il a accepté de prendre une fonction d’administrateur au Comité Centre et Sud afin d’y représenter son secteur géographique de production, alors en pleine émergence.
En 2008, prenant la suite de son beau-père, il s’est installé. En 2014, il s’est lancé dans les cultures d’oignons de semence et de consommation, ce qui lui a permis de mieux rentabiliser les matériels de culture et de conditionnement des pommes de terre. Aujourd’hui, la ferme exploite 310 ha répartis sur deux zones, l’une irriguée sur limons profonds battants située à Épeautrolles, à mi-distance entre Chartres et la région du Perche, l’autre sur des limons plus argileux et riches en silex à Bonneval. Elle produit en tout 30 ha de plants, 17 ha d’oignons (dont 5 ha de semences), 120 ha de blé, 60 ha d’orge et 60 ha de colza. De la période des semis en octobre à celle des récoltes au mois de septembre, la charge de travail est intense. Valère Pinson, son épouse Florence et les deux salariés n’ont guère le temps de chômer.
Le goût de transmettre
La formation occupe une grande place dans la manière dont Valère Pinson conçoit son métier d’agriculteur. De la même façon que la ferme accueille actuellement deux jeunes apprentis en alternance, l’un en bac pro, l’autre en BTS, elle accompagne les nouveaux producteurs de plants. « Notre ferme sert de vitrine. Des collègues viennent nous rendre visite, poser des questions sur la filière et ses organisations de producteurs, étudier comment nous sommes structurés. » Ces dernières années, Valère Pinson en a parrainé huit. Alors qu’au début des années 2000, le secteur de la Beauce ne comptait qu’un seul producteur de plants, il en recense aujourd’hui une quinzaine. « Notre terroir présente l’avantage de produire des plants de pomme de terre de bonne qualité sanitaire, avec très peu de défauts de présentation, et comme la région ne cultive pas encore trop de pommes de terre, nous parvenons à trouver un bon isolement pour produire des plants. Par ailleurs, les collecteurs apprécient de disposer de multiplicateurs situés à proximité des agriculteurs-utilisateurs car cela réduit leurs coûts logistiques. »

NB : Article publié initialement le 3 janvier 2025.