« Les va-et-vient dans les relations sino-américaines dictent le prix du soja », résume auprès de l'AFP Sébastien Poncelet, analyste chez Argus Media.
Ces derniers mois, le conflit douanier - avec une surtaxe de 20 % imposée par Pékin au soja américain - a fermé aux Etats-Unis le chemin du géant asiatique, premier acheteur mondial de la graine oléagineuse.
Voyant leur principal débouché à l'export bloqué, « les agriculteurs américains se désespèrent et crient au secours », en pleine récolte du soja, commente Damien Vercambre, analyste au cabinet Inter-Courtage.
Donald Trump a promis de leur venir en aide et a surtout adouci sa position vis-à-vis de Pékin, affirmant mardi s'attendre à conclure un « bon » accord commercial avec la Chine lors d'un sommet des pays de l'Asie-Pacifique la semaine prochaine.
« Le marché respire quelque peu, espérant que ces pourparlers (...) auront lieu et qu'ils seront positifs, ou du moins que la situation ne s'aggravera pas », commente Michael Zuzolo, analyste de Global Commodity Analytics and Consulting.
Cela a poussé les cours du soja, qui ont pris plus de 2 % en une semaine, le boisseau (27 kg) ayant clôturé à 10,30 dollars mardi à Chicago.
En revanche, dans le cas d'un échec des négociations, les Etats-Unis pourraient durablement perdre des parts de marché au profit de l'Amérique du Sud, alors que la Chine « s'efforce de diversifier sa chaîne d'approvisionnement (...) depuis près d'une décennie », notamment auprès du Brésil, explique l'analyste.
« Les Chinois jouent peut-être un intérêt pour des graines américaines » sans réelle intention de les acquérir mais simplement « pour faire baisser les prix des graines brésiliennes », prévient par ailleurs Damien Vercambre.
Autre ombre au tableau, depuis le 1er octobre, la majorité républicaine et l'opposition démocrate sont dans l'impasse au Congrès et l'Etat fédéral se trouve en état de paralysie, ou « shutdown », ce qui affecte la publication de bon nombre de données agricoles.
« Cette situation est préjudiciable » car il manque des informations pour « valider les mouvements », note Damien Vercambre.
C'est « un véritable casse-tête », abonde Dewey Strickler, analyste pour Ag Watch Market Advisors, mais « l'industrie continue d'avancer en se basant sur les chiffres du secteur privé ».
Doutes sur le maïs
Côté maïs, certains agriculteurs américains font état de rendements « moins bons » qu'estimé précédemment « à cause d'une fin de cycle particulièrement sèche sur l'est de la Corn Belt et de pluies trop abondantes à d'autres endroits qui ont généré des maladies », relève Sébastien Poncelet.
Des inquiétudes suffisantes pour redonner un peu de vigueur aux cours de la céréale, qui a clôturé à 4,19 dollars le boisseau mardi à Chicago.
« Il nous manque encore des éléments pour valider une tendance », remarque toutefois Damien Vercambre.
« Quoi qu'il arrive (...) la récolte sera quand même colossale », avance Sébastien Poncelet. Le ministère américain de l'Agriculture s'attend à ce que la production américaine atteigne 427 millions de tonnes, un record, dû notamment à une augmentation des surfaces.
De part et d'autre de l'Atlantique, les cours du blé connaissent des mouvements contenus, les fonds concentrant leur regard sur les exportations.
« Le blé français ne peut pas trop se permettre de progresser au risque de perdre des débouchés précieux à l'export », souligne Sébastien Poncelet, qui estime que les prix « ont trouvé leur point d'équilibre » en Europe.
Aux Etats-Unis, les volumes de blé inspectés avant exportation ont encore augmenté lors de la semaine achevée le 16 octobre, à plus de 480 000 tonnes contre 271 000 lors de la même période un an plus tôt.
A Chicago, le boisseau de blé restait juste au-dessus des 5 dollars les 27 kg.