Dans l’Yonne, « les colzas entament leur période de floraison. Ils sont très beaux cette année », observe Olivier Coste, agent relation cultures chez Soufflet. « Avec les orages annoncés autour du 15 août dernier, les agriculteurs ont pu anticiper les semis de bonne heure et l’automne a également été favorable à leur développement. Ainsi, les fortes biomasses ont permis de bien gérer le risque altises ».
« Le potentiel est là »
Il faut préciser que le département est concerné par des mutations "super KDR" des grosses altises. Dans son secteur, l’agent relation cultures constate alors un « fort développement de la technique du colza associé (avec de la féverole ou du fenugrec principalement) depuis 2-3 ans ». Ce n’est pas forcément le cas pour tous les agriculteurs yonnais, mais parmi ses clients, près de 90 % ont désormais adopté cette pratique.
« On peut dire aujourd'hui que le potentiel est là pour les colzas. Avec les conditions météo annoncées, l’heure est à la surveillance des pucerons cendrés », ajoute Olivier Coste. « Malgré quelques dégâts d'altises et des éclatements de tiges dus aux charançons par endroits, l'état des colzas est globalement bon aussi dans l'Oise », indique François Dumoulin, ingénieur référence méthodes à la chambre d'agriculture départementale. « Le risque méligèthes s'estompe, les apports d'azote ont été bien valorisés. Reste plus qu'à espérer des précipitations régulières pour conserver ce potentiel. Il faudra toutefois être vigilant quant au sclérotinia en cas de radoucissement pluvieux ».
Avec des T° fraiches depuis des semaines, le #colza a perdu son avance en Lorraine. Les colzas sont "beaux" du coté de Nancy. Les méligèthes sont très peu présents. Chaque semaine #terresinovia participe à l'analyse des risques insectes et maladies https://t.co/FotpnsSZAv... pic.twitter.com/yjvYbuhN2M
— Laurent JUNG (@laurentjung54) April 6, 2023
La situation semble plus hétérogène du côté de la Charente, comme en témoigne Christian Daniau, agriculteur et président de la chambre d’agriculture locale. « Il y a plusieurs cas de figure : les agriculteurs sont nombreux à avoir tenté les semis de colza dans le sec ». Les précipitations reçues fin août-début septembre pour certains ont permis une bonne levée des cultures, mais tous les secteurs n’ont pas été aussi bien lotis. « On a donc aujourd'hui des parcelles, en début de floraison, plutôt prometteuses et d’autres qui ont dû être détruites… » Enfin, certains agriculteurs n’ont pas pris le risque de semer en août dernier : « il va manquer des surfaces de colza dans le département cette campagne », estime le président de la chambre d’agriculture.
La floraison du colza est enclenchée, ça grouille de pollinisateurs qui se régalent ! ?? #zaza pic.twitter.com/wxMwwNhN85
— Clément Chataignon (@Clement_17) March 30, 2023
Ce paysage ?? pic.twitter.com/txG8khbh7L
— Thomas (@toto_bricolo) April 6, 2023
De bonnes conditions d'implantations pour les céréales à paille
En ce qui concerne les céréales d'hiver, « tous les espoirs sont permis », selon François Dumoulin. Dans son dernier rapport hebdomadaire, l' observatoire Céré'Obs de FranceAgriMer comptabilise 93 % des surfaces de blé tendre dans un état bon à très bon au 3 avril 2023 (92 % en 2022). 98 % des surfaces ont atteint le stade épi 1 cm à cette date (90 % en 2022 et 87 % sur la moyenne des 5 dernières années), et 17 % le stade 2 nœuds (11 % en 2022 et 10 % sur la moyenne quinquennale).
« Les céréales ont pu être implantées dans de bonnes conditions à l'automne et se sont bien développées pendant l'hiver. Le froid a pu les ralentir un peu. Enfin, les pluies du mois de mars (130 mm en moyenne) ont très été bénéfiques : elles sont tombées de façon qualitative, suffisamment étalées dans le temps et avec une bonne efficacité », explique Christian Daniau. « Tout est en place aujourd'hui pour ce que cela se passe bien, espérons que le dicton qui dit qu'on ne voit une parcelle belle qu'une fois ne se vérifie pas... »
Alors là le blé il est pas juste beau, il est incroyable !!!
— Antoine Thibault (@AgriSkippy) March 27, 2023
Va falloir une sacrée météo pour emmener ce potentiel au bout sinon le dicton qui dit qu'on ne le voit beau qu'une fois se verifiera... pic.twitter.com/WTpMZz76Zx
Le risque verse fait, par contre, son retour
Dans l'Oise non plus, « les cultures d'hiver n'ont pas souffert du sec en ce début d'année. Il faut dire que l'orge, comme le colza, est plutôt sensible à l'hydromorphie. Et les pluies de mars (environ 70 mm) ont permis de répondre aux besoins des céréales d'hiver et de bien valoriser les apports d'azote ». Constat similaire dans l'Yonne avec « un très bon développement des céréales à paille et un coefficient de tallage très important. On craint, par contre, la verse pour les blés, les orges d'hiver et même les orges de printemps semées à l'automne. Surtout que dans le secteur, les agriculteurs ne sont plus habitués à devoir réguler les céréales à paille ces dernières années », souligne Olivier Coste.
Comme le rappelle Arvalis, plusieurs facteurs de prédisposition peuvent entrer en jeu dans la fragilité des tiges : le choix variétal bien sûr, ainsi que le type de sol et toutes les pratiques culturales à l'origine d'une biomasse importante. En effet, « une densité de semis excessive et/ou une date de semis trop précoce vont accentuer le risque de verse, tout comme un apport d'azote précoce excédentaire ». « Les conditions climatiques rencontrées en début de montaison forment le dernier facteur de prédisposition (début de printemps avec un faible rayonnement et des températures basses ». Christian Daniau relève aussi ce risque en Charente « dans les terres un peu plus fortes ou pour les blés semés tôt. D'habitude, le régulateur, c'est le climat dans notre secteur », confie-t-il.
PODCAST NORIAP n°8 - Risque verse au printemps 2023 from Communication NORIAP on Vimeo.
« Il faut aussi être vigilant vis-à-vis des maladies ce printemps. » « Avec un hiver doux, le fond de cuve maladies était important, mais le froid en fin d'hiver a permis de limiter leur développement précoce. On est sur une année normale concernant le risque rouille jaune, observe François Dumoulin. Pour la septoriose, il va falloir suivre les conditions météo à venir ». En orge d'hiver, Olivier Coste souligne la présence de rouille naine, d'helminthosporiose et de rhynchosporiose. On observe quelques soucis de jaunisse suite aux attaques de cicadelles, mais cela reste à la marge ».
En ce qui concerne le retour du froid depuis le début de la semaine, les experts ne se disent pas inquiets à ce jour : il ne devrait pas avoir de conséquences sur les cultures d'hiver en place. Pour la suite du cycle, « il sera également important de piloter le dernier apport d'azote sur blé avec un outil adapté, fin avril-début mai. Le potentiel de rendement étant là, attention à la dilution ». Olivier Coste craint un taux de protéines faible.
Livraison d’#engrais afin de #nourrir le #blé ?? pour vous fournir des #baguettes ?? ??
— Guillaume LE POGAM ???????????? (@LePogamGuillaum) April 7, 2023
La prochaine étape sera d’évaluer l’état de nutrition des céréales (outil d’aide à la décision OAD)afin de correspondre aux critères de #commercialisation #qualité pic.twitter.com/b3Liez9M6k
De la pluie pour assurer le potentiel
Dans le pays charentais, les pois d'hiver ont également bénéficié de bonnes conditions d'implantation. Les agriculteurs yonnais tendent plutôt à délaisser cette culture, « les surfaces de pois d'hiver (et de printemps aussi) diminuent dans le secteur au profit du colza », observe Olivier Coste. Il relaie des soucis de bactériose et des dégâts de gibier cette année en pois d'hiver.
En résumé, l'état des cultures d'hiver semble globalement prometteur. Comme on le soulignait plus haut pour le colza, il ne reste plus qu'à espérer de l'eau en quantité suffisante afin d'assurer le potentiel de rendement. « Au cœur de la zone intermédiaire, on est souvent rappelé par la météo. L'offre climatique et le potentiel des sols ne permettent pas généralement de pallier certains aléas. Les coups de chaud limitent souvent les rendements... », note Christian Daniau. Pour les céréales, « il faudrait de la pluie entre fin avril et mi-mai et un retour lors de la première quinzaine de juin », estime Olivier Coste. Ou « environ 15 mm tous les 10 jours », selon François Dumoulin. Espérons que leurs souhaits soient exaucés !