« Sans utilité et décalé » pour 75 % des agriculteurs
« Aucune utilité et trop décalé par rapport à la réalité du terrain. » C’est ce que pensent, du Salon de l’agriculture, 75 % des 2 500 répondants (2 458 précisément) d’un sondage sur Terre-net, en ligne la semaine dernière. Pour 20 % seulement, le Sia est « une belle vitrine du métier d’agriculteur ». Seuls 5 % le voient comme « l’occasion de faire valoir des propositions auprès des politiques qui s’y rendent nombreux ».
Le pourcentage grimpe à 80 % pour les éleveurs
La même question a été posée sur Web-agri, soit auprès des éleveurs bovins plus spécifiquement (1 151 votants). Et le pourcentage de ceux qui jugent le salon « inutile et décalé » grimpe à 80 %. La part considérant qu’il permet au monde agricole de porter ses revendications auprès des élus qui viennent s’y montrer est, elle, stable à 5 %.
« La Sia reste une fête »
Vu les commentaires sous les articles, beaucoup de lecteurs de Terre-net/Web-agri semblent partager cet avis.
Ce n’est pas rien de monter une vache à Paris !
Il n’y a bien que Dédé, pour qui, le Salon de l’agriculture « reste une fête ». Il poursuit : « Ce n’est pas rien de monter une vache à Paris et je n’ai pas envie de me priver de ça ! Déjà qu’on ne gagne pas grand-chose… Si on ne veut pas que tout le monde déprime et que des jeunes s’installent en agriculture, il faut donner une image positive. Donc oui aux jolies vaches sur les rings !! »
« Il ne sert à rien »
La réaction de Jpland est conforme aux résultats des sondages : « Ce salon ne sert à rien. » Outre son inutilité, il déplore sa déconnexion vis-à-vis des difficultés du secteur agricole, le taxant de « ridicule, absurde, voire indécent » pour « la masse d’exploitants contraints d’arrêterou pire de se suicider », le nombre de cessations d’activité et suicides en agriculture étant très élevé.
Ridicule et absurde, quand les agriculteurs crèvent la bouche ouverte.
« Un salon pendant que des agriculteurs crèvent la bouche ouverte… », appuie Steph72. Paco85 prend le thème de cette année comme une provocation : « La transmission des exploitationsdans un métier sans avenir ni rémunération… Quel jeune pourrait être tenté ? Complètement à côté de la plaque !!! »
« Qu’une fenêtre médiatique pour les politiques »
Quid de l’opportunité de défendre la cause agricole auprès des responsables politiques ? Là encore, les lecteurs sont raccord avec les personnes sondées. Le Sia « n’est qu’une de fenêtre médiatique pour les politiques qui s’y pressent », reproche Jpland. « Ils ne font que prononcer des formules chocs à chaque inauguration », insiste Nico.
Seulement des formules chocs pour l’inauguration…
Quant à Anonyme, « tous ces ronds de jambe des politiques » le font « vomir tellement ça pue la mauvaise foi ». Louma évoque également les syndicats agricoles, se demandant s’ils seront « aussi vindicatifs » que pendant les manifestations d’agriculteurs de janvier et février 2024. Répondant du tac-o-tac : « Non ! » Pour autant, Nico a « l’impression que cette édition sera très courtisée » politiquement parlant.
Une édition risquant d’être « animée »…
Mais aussi « très animée », ajoute-t-il, pour « ne pas laisser s’éteindre les braises » qui subsistent suite à cette importante mobilisation agricole, espère Bouboule. Voire « mouvementé », selon Steph72, qui rappelle que les producteurs n’ont « rien obtenu », à part des mesurettes (sur le GNR, la jachère, la loi Égalim, Écophyto…) dont « une aide de 1 000 €/élevage », alors qu’ils réclamaient « des prix rémunérateurs et moins de harcèlement administratif ». Il parle même « d’un accueil spécial » réservé aux politiques, comme aux syndicats, sans plus de précisions.
Des tracteurs sur les autoroutes après ?
Creusois craint que « l’entrée donne accès à des combats de catch ». A minima, « plusieurs stands pourraient ne pas rester en place bien longtemps », prévient-il, sans préciser non plus lesquels. C’est pourquoi Ironman invite « les politiques à raser les murs ». Louma confirme : « Les attentes de la base, syndiquée ou pas, sont fortes. » Ce lecteur alerte sur « le risque de revoir des tracteurs sur les autoroutes après le salon ».
… ou à « boycotter »
Certains d’entre vous exhortent à boycotter le Salon de l’agriculture. Momo par exemple : « Mieux vaut préparer les vaches pour l’abattoir que pour Paris !! » « En un an, j’ai perdu 50 % des aides bovines !! », justifie-t-il. « S’il restait suffisamment de solidarité dans notre profession, les éleveurs – grands oubliés des annonces du gouvernement face à la crise agricole – n’iraient pas au salon », enchaîne Bouboule. « Vous voulez montrer que la profession agricole se meurt, alors montrez aux Parisiens une agriculture sans animaux », suggère-t-il.
Virer plutôt industriels et distributeurs.
« Aucun agriculteur et surtout aucun éleveur ne devraient être présents à ce salon de la honte, où se pavanent tous ceux qui nous volent la marge de nos produits !!! », martèle Didier. Jmb67 préconise donc plutôt de « virer industriels et distributeurs du Sia ». De toute façon, depuis les manifs, « silence complet » : « on ne les entend plus fanfaronner devant les journalistes » !
Ou délocaliser le salon en province.
Anonyme propose de délocaliser le Sia en province. « Pourquoi ce « parisianisme » permanent ? », interroge-t-il ce qui, semble-t-il dire implicitement, pourrait permettre à ce salon de retrouver son ancrage agricole et terrain. « Les Parisiens n’auront qu’à venir avec leurs voitures électriques », ironise-t-il. En tout cas, ils pourraient découvrir une agriculture moins bucolique et plus authentique.