« On cherche à modifier nos pratiques culturales pour baisser l’IFT de 0,1, alors que le traitement de semences représente 1 point d’IFT ». Ce chiffre a interpellé des agriculteurs d’Ille-et-Vilaine, membres d’un groupe Eco-phyto animé par le Ceta 35. « En agriculture bio, le blé est implanté sans traitement de semences. Le groupe s’est dit qu’il y avait des choses à tester », partage Marc Delatouche, animateur cultures au Ceta 35.
Que ce soient les semences certifiées ou les semences fermières, la plupart reçoivent un traitement fongicide, contre la fusariose. « Les références Arvalis montrent que la fonte des semis a une fréquence faible et une nuisibilité faible à moyenne, précise Marc Delatouche. Le risque de fusariose est plus problématique pour les parcelles destinées à la production de semences fermières, quand le précédent était un maïs grain ».
Le traitement fongicide protège également de la carie « qui peut être plus nuisible mais reste peu fréquente ». En option, peut être ajoutée au traitement une protection contre le taupin ou contre le piétin échaudage.
Pas de différence de rendement significative
Pour évaluer l’impact d’une absence de traitement de semences sur le rendement, les adhérents du Ceta ont conduit différents essais. Sur 2023 et 2024, des essais ont été faits en micro-parcelles. La moyenne de rendement avec des semences traitées a été de 84,2 q et de 83,9 q avec des semences non traitées. « Cet écart n’est pas significatif », analyse Marc Delatouche. Il n’y a pas de différence sur les critères de qualité, PS ou teneur en protéines.
En complément, des essais ont été conduits chez 3 agriculteurs. Dans des parcelles, ils ont implanté, en semences fermières, un mélange de variétés sélectionnées pour limiter le besoin en fongicides et régulateurs, en 3 modalités : sans traitement de semences, avec le biostimulant TMF de TMCE, avec un traitement de semences fongicide à base de Celestnet. Des tests de germination ont montré, chez un des agriculteurs, une différence avec plus de perte pour la semence non traitée.
« En semence fermière, il faut toujours faire un test de germination pour adapter la densité de semis », rappelle Marc Delatouche. Puis, des comptages à la levée ont été réalisés. Ils n’ont pas montré de différence significative sur le nombre de pieds mais la levée a été plus rapide pour la modalité sans traitement. Enfin, les épis ont été comptés en juin. « Ils étaient un peu plus nombreux, 15 à 30 épis de plus par m², dans la modalité semence traitée que dans celle semence non traitée, mais ce n’est pas significatif », analyse Marc Delatouche.
Même si traitement de semences peu cher, autour des 6 €/ha pour le fongicide Celestnet, ces premiers essais montrent que le traitement de semences n’apporte pas un gain de rendement significatif, dans des parcelles sans risque particulier de carie ou de piétin échaudage. « Il est donc envisageable de s’en passer pour baisser l’IFT, pour réduire l’exposition aux phytosanitaires et dans une démarche environnementale, souligne Marc Delatouche. Avoir des semences non traitées aussi intéressant pour gérer les fins de semis. Sans traitement, le blé gardé pour la semence peut être commercialisé si on a des quantités restantes ».
De nécessaires précautions agronomiques
Pour produire des semences fermières, il est recommandé de partir de semences certifiées traitées, dans une parcelle avec un risque fusariose faible, donc pas après un maïs. Les semences devront être triées avec précaution pour éliminer les graines d’adventices et les grains malades.
Si le blé est implanté dans une parcelle avec des précédents de carie, le traitement de semences se justifie. Une alternative existe en biocontrôle, car le vinaigre est efficace contre la carie.
Si l’absence de traitements de semences est envisageable en blé, elle semble plus délicate en orge, du fait des problèmes de charbon nu.
