Nicolas Loingeville, son épouse Isabelle et son beau-frère Gauthier Deram sont agriculteurs dans le Nord. L'exploitation s'étend sur deux sites : à Sercus dans les Flandres, où était située la ferme familiale d'Isabelle et Gauthier, reprise par ce dernier il y a 25 ans, et à Baisieux près de Lille où était localisée celle de Nicolas, dans la famille depuis plusieurs générations également et sur laquelle il s'est installé en 1999 et sa femme en 2006.
La pomme de terre, « spécialité » de la ferme
Depuis 16 ans qu'ils sont associés, les trois producteurs y cultivent en agriculture raisonnée du blé, du maïs, du lin, des betteraves, des légumes de plein champ, notamment des haricots verts, et des pommes de terre, leur « spécialité » sur 50 à 60 ha, précisent-ils. Il faut dire que le corps de ferme, situé à Sercus, est sur une "butte". D'où « une belle vue sur les champs, le village et les monts des Flandres », qui a inspiré le nom du lieu-dit puis, par la suite, celui de la ferme : la SARL La Bellevue.
Les producteurs font découvrir leur production de pommes de terre, aux initiés comme au grand public, sur leur page Facebook Ferme La Bellevue et leur compte Instagram, tout au long de l'itinéraire cultural, et sur le site internet de la Ferme La Bellevue.
La "Bellevue", une chips aux ingrédients tous français
Puisque l'exploitation est spécialisée dans la pomme de terre, elle a choisi, « après plusieurs années de réflexion, d'essais et d'échanges avec l'entourage », de se diversifier dans... la fabrication d'une chips artisanale, qui s'appellera elle aussi "La Bellevue" pour mettre en avant la ferme et l'origine française du produit ! « L'objectif est de mieux valoriser nos pommes de terre à travers un aliment festif, et grâce à des ingrédients de qualité, exclusivement français et si possible locaux, y compris pour l'emballage », dont la conception est également "fait maison", expliquent les exploitants. « En France, nous mangeons en moyenne 1,1 kg de chips par an et par habitant, à 85 % importées de l'étranger », font-ils remarquer.
Cuites « traditionnellement au chaudron »
« En plus de maîtriser notre production de A à Z, cela va nous permettre de développer nos ventes en circuits courts », ajoutent les agriculteurs (ils commercialisent déjà en direct des pommes de terre) qui veulent créer une chips « grande, épaisse, croustillante et goûteuse » comme ils les « aiment ». Pour cela, et pour garantir « la qualité et la régularité », ils transformeront seulement les pommes de terre qu'ils produisent. Elles seront cuites de manière « traditionnelle, au chaudron, dans le l'huile de tournesol et finement salées au sel de l'Île de Ré », afin d'apporter une touche « d'iode » et d'originalité. Résultat : des chips « moins grasses et moins salées ».
Écoutez les producteurs présenter leur projet, dans cette vidéo publiée sur Youtube :
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Avec l'énergie photovoltaïque produite sur l'exploitation
Le but est aussi de « limiter l'empreinte carbone » de la ferme, en particulier via les énergies renouvelables et la préservation des ressources naturelles. Les panneaux photovoltaïques, déjà installés sur les bâtiments (1 300 depuis 2018), fourniront une partie de l'électricité consommée par le nouvel atelier. Depuis plusieurs années, les agriculteurs sont également « attentifs à la gestion de l'eau » et récupèrent, entre autres, les eaux de pluie. Ils réfléchissent, par ailleurs, à un emballage recyclable pour les chips.
À noter : l'exploitation est certifiée Global Gap (référentiel privé spécifique aux fruits et légumes, créé en 1997 par la grande distribution d'Europe du Nord afin de garantir la sécurité maximale des produits alimentaires) et GRASP (certification liée aux bonnes pratiques sociales). « Nous veillerons continuellement à améliorer nos méthodes et optimiser notre production pour nous adapter aux enjeux de demain », insistent Nicolas, Isabelle et Gauthier.
S'appuyer sur les compétences et l'expérience de chacun
Que de bons ingrédients pour que la mayonnaise, ou plutôt les chips, prennent ! D'abord auprès d'un autre membre de la famille, de la prochaine génération qui plus est et qui, au départ, ne souhaitait pas forcément revenir sur l'exploitation familiale : Manon, la fille d'Isabelle et Nicolas, « fraîchement diplômée d'un master en marketing digital et e-commerce ». Une formation qui est un vrai plus pour l'activité de diversification. « Après six ans d’études, j’avais envie d’un projet qui a du sens et qui me parle. Alors je n’ai pas hésité une seconde à rejoindre la ferme, en septembre 2021, pour développer cette belle initiative », déclare la jeune femme de 24 ans.
Quant aux trois autres associés, ils pourront s'appuyer sur leurs anciennes expériences professionnelles, plusieurs années dans la grande distribution et la logistique pour Nicolas et 10 ans dans une confiserie pour Isabelle. Gauthier, lui, a toujours su que « sa destinée » était « de reprendre l'exploitation familiale ». Chacun a également ses propres atouts et se présente de façon humoristique comme « le coordinateur » pour Nicolas, « le couteau-suisse » pour Isabelle, « le bricoleur » pour Gauthier, « la jeune pousse » pour Manon. Ils peuvent aussi compter sur leurs deux salariés agricoles, Bertrand, « l'astucieux pour qui il n'y a aucun problème, que des solutions » et Marie « le rayon de soleil, toujours positive et motivée » et qui, en plus, a travaillé longtemps dans l'agro-industrie.
8 100 € de financement participatif pour aménager l'atelier
Mais avant de pouvoir déguster les chips La Bellevue, il a fallu réaliser « une étude de marché, un business plan et définir une stratégie marketing et de communication ». Et surtout monter une ligne de production, dans l'un des hangars de l'exploitation. Et donc, au préalable, refaire la toiture qui n'était plus étanche, puis aménager l'intérieur selon les normes agroalimentaires (sol, murs, installations électriques, etc.).
Des investissements conséquents, pour lesquels les exploitants ont sollicité le soutien de la plateforme de financement participatif Miimosa (appel aux dons avec comme contreparties des chips bien sûr, mais aussi la possibilité de participer à leur fabrication et de recevoir des goodies comme des bols apéritifs et des pinces pour refermer les paquets), avec deux paliers de 10 000 et 15 000 €, le premier pour la réfection du toit, atteint à 80 % (8 100 € collectés auprès de 148 contributeurs), et le second pour l'aménagement, toujours ouvert aux dons. Ainsi, les travaux ont pu commencer. Les producteurs espèrent une mise en service de la ligne de production en janvier 2023, pour une commercialisation des premiers sachets le plus rapidement possible. « La première année, nous espérons en vendre 200 000, de 40 ou 150 g de chips nature, et augmenter ensuite progressivement les volumes et les goûts proposés », précise Manon.
Objectif : 200 000 sachets de chips dès 2023.
Pour faire connaître leur produit, en plus d'une soirée de lancement destinée à remercier aussi tous ceux qui les ont soutenus (partenaires, contributeurs de la cagnotte...), les agriculteurs en feront la promotion lors d'événements locaux et sur les réseaux sociaux. Ils organiseront également des dégustations dans les points de vente. « J'ai commencé à démarcher des magasins de producteurs, des épiceries et des grandes surfaces pour renforcer notre visibilité, uniquement de la région parce que notre chips est locale. Tous sont motivés par notre projet et ont hâte de goûter nos "prototypes" », indique la jeune femme qui travaille actuellement sur le logo et le packaging.