Irrigation du tournesol : faisons une croix sur les idées reçues ! (©N. Harel)
Le tournesol est de plus en plus souvent implanté sur des sols superficiels, voire intermédiaires. Autant de situations où une irrigation bien conduite apporterait une plus-value économique. Terres Inovia propose de faire le point sur les idées reçues.
Le tournesol n’est pas consommateur d’eau → FAUX
Le tournesol peut consommer beaucoup d’eau quand elle lui est fournie en abondance. Cependant l’atout du tournesol est de pouvoir atteindre son optimum de rendement avec une couverture de seulement 75 % de ses besoins en eau. Du début de la floraison et jusqu’à la fin du remplissage des graines, le tournesol est dans une phase de sensibilité maximale à la sécheresse ; c’est en effet durant cette période que le taux de nouaison et le PMG (poids de mille grains) sont déterminés. Durant cette phase, 230 mm d’eau (réserve utile + pluie + irrigation) sont nécessaires pour assurer un rendement de 30 q/ha. La variation des résultats économiques en fonction du confort hydrique de la plante illustre bien cette valorisation de l’eau.
Marges brutes tournesol indicatives simulées en fonction de la pluviométrie de l'été et du type de sol (©Simulations de V. Lecomte/Terres Inovia)
Avec une même quantité d’eau, le tournesol tire son épingle du jeu comparé à d’autres cultures d’été → VRAI
Même si le tournesol est une culture d’été relativement robuste vis-à-vis d’un stress hydrique, l’irrigation peut être économiquement très bien valorisée. Ainsi, lorsque l’on compare la marge dégagée par un tournesol irrigué à celle du soja et du maïs irrigués, pour une même quantité d’eau apportée, nous constatons que le tournesol tire son épingle du jeu dans les sols superficiels et intermédiaires. Ce résultat a été obtenu avec des volumes d’apport limités (moins de 120 mm au total) et en s’adaptant à un arrêt précoce de l’irrigation (avant le 10 août) : une situation de plus en plus fréquente dans le contexte réglementaire et de changement climatique en cours !
L’irrigation du tournesol, c’est simple : il suffit de l’intercaler avec les tours d’eau prévus dans le maïs voisin → FAUX
Les besoins en eau d’irrigation du tournesol sont inférieurs à ceux du maïs, moins de tours d’eau seront donc nécessaires. De plus, les phases de sensibilité au stress hydrique sont également différentes. De ce fait, il faut programmer les apports sur tournesol indépendamment de la conduite des autres cultures irriguées.
Il faut positionner son 1er tour d’eau obligatoirement avant la floraison (stade bouton) → FAUX
Il faut raisonner son 1er apport selon le type de sol, la quantité d’eau disponible, la croissance du tournesol et son état de stress hydrique. Le tournesol a la particularité de tolérer d’autant mieux le stress hydrique pendant la phase de sensibilité qu’il a subi une contrainte hydrique modérée pendant sa phase végétative. En effet, en limitant la surface foliaire des plantes, un stress hydrique progressif avant la floraison permet au tournesol de réduire sa consommation d’eau et lui donne l’occasion de « s’endurcir » à la sécheresse par la mise en place d’adaptations physiologiques.
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Le déclenchement de la première irrigation est souvent précipité et succède à l’observation d’un flétrissement des feuilles, le plus souvent temporaire et sans conséquence, en cours d’après-midi, au moment où la demande est la plus forte. Il est pourtant judicieux d’accepter de faire modérément « souffrir » son tournesol en préfloraison, de façon à obtenir une surface foliaire satisfaisante mais sans exubérance à la floraison ; de façon à pouvoir la maintenir dans le temps par l’irrigation. Il faut cependant s’assurer que le flétrissement ne persiste pas en début de matinée.
Les règles de décisions d’une stratégie d’irrigation à l’optimum. (©Terres Inovia)
Irriguer pendant la floraison est interdit → FAUX
Le principal écueil serait de favoriser le sclérotinia du capitule, cependant ce risque sera limité si on a choisi une variété à bon comportement face à cette maladie, et en irriguant par temps sec. Il vaut mieux répondre au besoin hydrique du tournesol plutôt que le laisser souffrir jusqu’à fin floraison.
Irriguer en sol superficiel et intermédiaire est rentable → VRAI
Avec un gain moyen de 1,2 à 1,4 q/ha par tranche de 10 mm apportés dans les sols superficiels, et de 0,8 à 1 q/ha dans les sols intermédiaires, l’avantage économique d’une irrigation maîtrisée est largement démontré dans ces sols.
En sol profond, la valorisation de l’eau d’irrigation est plus aléatoire car le tournesol, sous réserve d’être bien enraciné, est capable de puiser dans la réserve en eau du sol au-delà d’un mètre de profondeur.
70 mm d’eau apportés = 100 à 200 €/ha de marge supplémentaire, selon le contexte hydrique de l’année (Simulations de V. Lecomte : 2 apports de 35 mm d’eau, marges brutes hors aides avec prix de vente du tournesol de 370 €/t et un coût de l’eau de 15 c€/m3). (©Simulations de V. Lecomte/source : CRA Occitanie)
Une parcelle en sol superficiel qui est irriguée n’a pas besoin d’azote → FAUX
Irriguer n’implique pas de faire impasse sur les bonnes pratiques de production du tournesol : densité de semis, fertilisation etc. Le respect des fondamentaux techniques permet d’exploiter le potentiel de la culture. La quantité d’azote à apporter se raisonne en tenant compte des reliquats de la parcelle et de l’objectif de rendement visé. L’apport d’eau accentue la minéralisation du sol.
Attention toutefois à éviter une sur-fertilisation pouvant conduire à une croissance foliaire exubérante avant floraison. Une telle situation mènerait à une évapotranspiration excessive pendant l’été, et pénaliserait le rendement par l’épuisement prématuré de la Réserve Utile.
Préférer un positionnement de l’apport azoté en végétation, suivi d’un binage si aucune pluie n’est prévue dans les jours qui suivent, afin d’éviter un excès de croissance foliaire précoce.
L’irrigation du tournesol va favoriser la visite des abeilles, et ainsi la production de graines → VRAI
En réduisant le stress hydrique du tournesol à la floraison, l’irrigation favorise la sécrétion de nectar, source d’alimentation essentielle pour les abeilles. Elle augmente de ce fait l’attractivité des plantes pour les insectes pollinisateurs sauvages et domestiques. Or, lorsque la fréquentation des capitules par les insectes augmente, les transferts de pollen sont favorisés. Cela limite les défauts de fécondation, qui peuvent empêcher les variétés peu autofertiles d’atteindre leur potentiel de rendement grainier. Autre effet positif, la pollinisation entomophile augmente la teneur en huile des graines.
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