Alors que la Commission européenne projette d’augmenter les droits de douane sur les importations d’engrais de Russie et de Biélorussie, l’AGPB s’inquiète : avec ces nouvelles sanctions, « la situation du prix des engrais pourrait s’aggraver », écrit-elle dans un communiqué.
« Les prix des engrais augmentent - la solution azotée était à 270 euros la tonne en juin et est remontée à 340 euros depuis quinze jours - alors que les cours du blé baissent. Imposer des taxes maintenant va encore faire monter les prix des fertilisants, on ne va pas s'en sortir », a déclaré à l'AFP Cédric Benoist, secrétaire général adjoint de l'association spécialisée.
Pour l’AGPB, il y a plus que jamais urgence à lever les taxes sur les engrais d’autres origines. Les maintenir, « alors que l’on parle économie de guerre, c’est littéralement se tirer une balle dans le pied ! », s’alarme Éric Thirouin, son président.
Il cible notamment « la taxe anti-dumping, qui avait pour objectif initial la protection et le maintien de l’activité des fabricants d’engrais européens ».
« Or, ces derniers sont aujourd’hui peu nombreux avec des capacités de production en baisse, ils profitent donc du jeu de l’offre et de la demande au détriment de la survie économique de nos fermes », explique Cédric Benoist.
« Approvisionnement alternatif à la Russie »
« Sanctionner la Russie, oui, mais il est nécessaire d’agir dans le bon ordre, exhorte le communiqué. L’Europe doit s’assurer au préalable de notre capacité de production agricole dans des conditions économiquement supportables. » Et construire rapidement « une stratégie de diversification d’approvisionnement des intrants azotés accessibles, fiables et compétitifs ».
L'Europe reste très dépendante de la Russie pour ses achats de fertilisants : en 2024, plus d'un quart de ses importations d'engrais provenait de Russie, soit 6,2 millions de tonnes sur un total de 24 millions de tonnes importées, tous engrais confondus, selon les données de la Commission.
« Le temps de mettre en place un approvisionnement alternatif à la Russie », l’AGPB demande l’abrogation des droits de douanes de 6,5 % sur toutes les origines hors Russie et Biélorussie, la suspension immédiate des taxes anti-dumping sur les origines Trinidad et Tobago et USA, et le report à 2026 de l’application des sanctions contre les engrais russes, comme pour l'aluminium.
De leur côté, les fabricants français d'engrais, rassemblés au sein de l'Union des industries de la fertilisation (Unifa), appellent au contraire l'Europe à instaurer des mesures face à la « menace croissante » que représente la Russie pour leur secteur : les importations d'engrais russes en France « ont bondi de 80 % » entre 2021 et 2023, affirment-t-ils.
L'Unifa a dénoncé fin janvier une « concurrence agressive », avec des « coûts de production bien inférieurs en Russie, dus à un accès avantageux au gaz naturel », à partir duquel est produit l'ammoniac, premier ingrédient des fertilisants azotés.