A près les méligèthes et les pucerons verts, les grosses altises et les charançons du bourgeon terminal font, à leur tour, de la résistance depuis quelques années. « Des niveaux très élevés de résistance des grosses altises apparaissent tous les ans dans de nouveaux départements », notent Céline Robert et Laurent Ruck, ingénieurs Terres Inovia. Pour ce bioagresseur, deux types de résistance peuvent expliquer le manque d’efficacité des pyréthrinoïdes : la mutation du gène « kdr » (knock down resistance), la plus répandue, et celle dite « super kdr 1 ». Dans le premier cas, le niveau d’efficacité de ces insecticides varie « entre 25 et 65 % ». Dans l’autre cas, il est « encore plus faible, voire nul ».
En ce qui concerne le charançon du bourgeon terminal, « l’efficacité peut énormément varier selon les populations : entre 10 et 100 % », en raison notamment du mécanisme de résistance par mutation « kdr ». Le distinguer de la résistance par détoxification est toutefois difficile. D’autres ravageurs, comme le charançon des siliques ou le charançon de la tige du chou, suivent le pas. Avec les pratiques actuelles utilisant très largement les pyréthrinoïdes à l’automne, une résistance généralisée à l’ensemble du territoire se profile.
Ne pas tout miser sur la lutte chimique
Afin de maintenir la durabilité de la culture du colza, « limiter le recours à cette famille d’insecticides est indispensable », rappellent Céline Robert et Laurent Ruck, en utilisant d’autres familles chimiques efficaces. Miser sur l’observation est essentiel, tout comme « respecter scrupuleusement les seuils d’intervention : huit pieds sur dix avec morsures jusqu’au stade quatre feuilles pour les grosses altises et une intervention quinze jours après les premières captures (cuvette jaune ou Bulletin de santé du végétal) s’ils ont lieu fin septembre, sinon huit à dix jours après » pour le charançon du bourgeon terminal. Pour rappel, l’implantation constitue une étape clé afin d’assurer une croissance dynamique de la culture et limiter ainsi la nuisibilité des ravageurs d’automne. L’association du colza avec des légumineuses gélives joue également contre les attaques d’altises d’hiver et du charançon du bourgeon terminal.
Piégeage du jour: 5 grosses altises adultes! #achtung ??#agriraisonnée #colza pic.twitter.com/b7FXqtib6Q
— Pat28???????????? (@Pat2816) September 16, 2019
Favoriser les auxiliaires
Autre point à favoriser : les auxiliaires ! Hyménoptères, prédateurs du sol ou volants agissent comme de véritables alliés du colza en consommant ou parasitant les insectes ravageurs. Dans une situation d’équilibre écologique, le taux d’efficacité de régulation peut atteindre plus de 90 %, selon les experts Terres Inovia. Ce n’est cependant pas le cas partout : la proportion ne dépasse pas les 5 % sur les plateaux de Bourgogne par exemple.
Dans ce contexte, sept agriculteurs de l’Yonne se sont lancés cette année dans le projet R2D2 2 et participent à des expérimentations visant à favoriser la présence et le développement de ces insectes auxiliaires. Objectif à terme : pouvoir généraliser ces solutions à l’ensemble du territoire. La mise en place d’abris et de ressources alimentaires avec l’implantation de bandes fleuries comptent parmi les pistes travaillées. Autre pratique : des espaces sont laissés au repos, sans travail du sol, afin de ne pas « perturber les insectes auxiliaires avec un labour profond. Tout ou partie de leur cycle de développement a en effet lieu dans le sol ». La réduction de l’utilisation d’insecticides contribue logiquement à protéger ces insectes régulateurs.